Haut bas fragile – sur Départs de feu d’Olivier Cadiot
«Avoir l’esprit en escalier », disons-nous lorsqu’une pensée succède à une autre et que le lien logique entre elles nous échappe. L’expression est tentante pour qualifier le dernier écrit d’Olivier Cadiot. Car d’escaliers, il y est question : on y chute en pleine nuit et on manque d’y laisser sa peau. On y évoque surtout une chute bien plus grave, de bien plus haut, et mortelle.

Quant au lecteur, il découvre un texte divisé et sous-sous-divisé en marches irrégulières, fêlées, néanmoins maîtrisées (le hasard y a moins de place que prévu). La comparaison pourrait s’arrêter là car le livre est intitulé Départs de feu et il crépite. L’escalier a pris feu ; demeurent des rêves, des songeries, des peurs, des couleurs, des pensées, des commencements, des choses sans lendemain ou presque.
Olivier Cadiot n’a pas moins de quinze ouvrages derrière lui, mais tous ne sont pas exactement de la même teneur. Celui-ci semble renouer avec la veine du tournant XXe-XXIe siècles, des écrits à la poésie contre-lyrique qui se prêtent à merveille à la scène et à la lecture à voix haute. Non pas que l’écriture soit dramaturgique, peu importe même qu’Olivier Cadiot traduise pour le théâtre, il a plusieurs cordes à son arc. Cette corde-ci est celle d’un « je » qui soliloque à tout va, seul, orphelin, hanté par des fantômes de famille : une sœur, un oncle, un père. Médecine générale, le seul de ses livres qui s’apparente à un roman, commençait avec le corps de son frère mort. Départs de feu rappelle en creux, au loin, sans insister, une sœur disparue, une chute consentie, un traumatisme, et en plein été, saison pleine de cruauté.
Le sous-texte autobiographique est là, à la fois tenu à distance et explicite, pris dans les enchaînements saccadés de pensées rebondissant, de folles élucubrations, de saillies comiques, d’éléments saugrenus qui sont la marque, le sceau d’Olivier Cadiot. Paragraphes compacts, retours-lignes intempestifs, articles jetés par-dessus les moulins, reprises sonor