Immigration, le « hors sujet » d’Emmanuel Macron
Dans le propos liminaire de sa première conférence de presse élyséenne, Emmanuel Macron a dit souhaiter apporter des réponses à la crise des « gilets jaunes ». Et très vite, il a évoqué l’immigration. Il faut s’interroger sur ce parti pris. Déjà dans sa lettre aux français pour cadrer le « grand débat », le président y avait consacré un paragraphe et suggéré des quotas [1], une idée portée par Nicolas Sarkozy en 2007. Mais, au final, le sujet avait été rétrogradé en sous-thème et très peu évoqué dans les débats. 5000 contributions sur plusieurs centaines de milliers y font référence aussi bien pour demander un meilleur accueil des réfugiés que le contrôle des frontières.

Alors pourquoi ce « hors sujet » pendant ce grand oral à l’Élysée ? La réponse est à chercher dans le vocabulaire utilisé comme « l’immigration subie » et les propositions comme la remise en cause de Schengen : Macron fait du Sarkozy au mot près, sur l’immigration comme sur le « travailler plus ». Il n’est pas anodin de reprendre des termes utilisés il y a douze ans par un autre président dans un autre contexte, et d’évoquer qui plus est des mesures qui ont fait « pschitt » comme celle des quotas. Emmanuel Macron s’inscrit dans une lignée politique. Il envoie un signal à des électeurs qui ont voté pour le parti de Nicolas Sarkozy, pas aux siens. [2]
Si l’on analyse la sociologie de l’électorat d’Emmanuel Macron et de la République en marche en 2017, on y retrouve des catégories sociales plutôt ouvertes sur la question migratoire car plus diplômées, avec des revenus relativement élevés, souvent des cadres, habitant dans des métropoles ou des villes multiculturelles. Les quelques enquêtes dont on dispose sur l’électorat de Macron le confirment. Ainsi, dans un sondage IFOP/fondation Jean Jaurès/American Jewish Committee de décembre 2018, 83 % des sympathisants LREM interrogés répondaient que l’accueil des migrants fuyant la guerre et la misère était « le devoir de notre pays », 81 % des sympathisants