De profondis – sur Hommages de Julien Perez
L’art est docile, faible. Il se laisse soumettre. Il se laisse conquérir.
Ces mots résonnent sur la page blanche d’une belle collection de chez P.O.L. Les phrases sont prêtées à d’autres. C’est plus facile, notamment quand elles sont parties de l’œuvre d’un artiste polymorphe : Julien Perez. Ce dernier signe ici son premier roman lequel s’intitule Hommages. Évocation acerbe et drôle de la vie d’un artiste et de son milieu, il ne doit pas se limiter aux intitulés, aux anecdotes, ni aux farces et aux clins d’yeux parfois convenus. Il s’agit, à sa manière, d’une étude des relations sociales à l’œuvre dans un milieu codifié et complexe.

Entre 1998 et 2000, au Collège de France, Pierre Bourdieu livre un ensemble de cours intitulés Manet, une révolution symbolique. L’objectif dans cette noble entreprise est de déceler les contours de la « révolution » que fut l’œuvre de Manet et de son entourage. Cela devait construire et annoncer l’art moderne. Le sociologue décrypte quels ont été les accompagnants, les contradicteurs, les relais et les cadres sociaux. Il y aurait (toutes proportions gardées !) une ambition similaire dans l’ouvrage de Julien Perez, celle de donner à voir la construction, ou plutôt l’existence, d’un champ artistique dans l’indéfinissable art contemporain.
Cela se fait par le biais des différentes voix, ses relais comme ses opposants, parents et comparses. Nous y croisons ainsi galeristes, assistants, collectionneurs, compagnons, ami.es de l’École d’art, concurrents, commissaires d’exposition, familles et publics. Le récit polyphonique-poétique, mais aussi grinçant offre un panoramique tranchant sur un milieu et un ethos professionnel gagné par l’ennui, l’incompréhension de son propre objet et ses inquiétudes récurrentes.
Sans public
Paru à l’occasion de la rentrée littéraire de janvier 2025, Hommages est à plusieurs endroits surprenant. Par son auteur tout d’abord : Julien Perez est musicien et chanteur, il évolue dans les arts visuels et trav