Connaître la loi de 1905 et l’appliquer
Célébrée chaque 9 décembre, et spécialement cette année où elle fête ses 120 ans, la loi de 1905, séparant les Églises de l’État, reste pourtant mal connue, d’autant plus qu’elle s’insère dans un processus qui va de 1902 à 1908. Ainsi, pour comprendre ce qui a conduit à la confection de la loi (et à son application), il faut prendre ses distances avec certaines idées reçues.

D’abord, existait en France non un « système concordataire », comme on l’écrit trop souvent, mais un régime de « cultes reconnus[1] ». Certes, ce régime comprenait le Concordat de 1801, mais celui-ci n’était devenu une loi de l’État, l’année suivante, que complété par des Articles organiques où le catholicisme devait partager la légitimité religieuse avec deux cultes protestants (luthérien et réformé) puis, progressivement, le culte israélite. Ainsi, quand l’article 2 de la loi de séparation affirme que « La République ne reconnaît […] aucun culte », cela ne signifie pas qu’elle ignore les religions (au contraire puisque, selon l’article premier, elle « garantit leur libre exercice ») mais qu’elle met fin au statut officiel de ces cultes.
Ensuite, malgré l’accroc de l’interdiction du divorce en 1816, la loi était déjà laïque – le Code civil ne se réfère en aucune manière à la religion et, parfois, transgresse des normes religieuses. En revanche, la morale publique devait avoir un fondement religieux, ce qui justifiait que les « ministres » des cultes reconnus soient salariés – et étroitement surveillés ! – par l’État. Par ailleurs, l’école publique commençait et terminait ses journées par des prières et elle comportait un cours de morale religieuse. Aristide Briand qualifie ce régime de « demi-laïcité ».
Un basculement vers une « complète laïcité » (dixit Briand) commence à s’opérer avec la laïcisation de l’école publique (1882-1886), et l’instauration d’une morale laïque. Mais, attention, contrairement au stéréotype, l’école n’était pas « laïque et obligatoire » ; l’instruction devint
