Indépendance factice de l’Afrique, à qui la faute ?
La « situation coloniale » a donné lieu à une vague de protestations plus ou moins pacifiques dans les années 1940-1950. Ces protestations, en Afrique francophone, ont, concomitamment, conduit à l’adoption de la loi cadre de Gaston Defferre (1956) pour encourager la logique du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », aux côtés des luttes intellectuelles anticolonialistes ayant épousé diverses formes de revendication : d’un socialisme africain à un panafricanisme anti-franc CFA aujourd’hui, nous avons vu défiler le mouvement de la négritude et d’une philosophie afro-africaniste que d’aucuns ont qualifiée d’ethnophilosophie. Les querelles idéologiques nonobstant, tous ces mouvements martelaient le même mantra : l’authenticité africaine.
Bien que ces luttes et discours anticoloniaux n’aient pas totalement perdu de leur légitimité dans une « Afrique-monde » où l’on continue de s’interroger sur la portée des indépendances, nous voudrions faire remarquer que ces « cris » ou « sanglots » des Africains s’empêchent très souvent d’aller au-delà d’une grille de lecture linéaire, voire binaire du fait (néo)colonial, privilégiant ainsi – peut-être est-ce involontaire ? – une subjectivation africaine par l’auto-victimisation. Ils brouillent, ce faisant, les pistes d’une conscience et d’une projection de soi véritables en Afrique. L’afro-centrisme qui en résulte immanquablement produit chez certains africains une « disposition d’esprit » favorable à l’éthique réactionnaire qui, inconsciemment, continue de drainer le fait colonial dans les consciences.
Nous pensons donc que l’un des plus grands enjeux des luttes contemporaines en Afrique se joue dans l’interstice de la décolonisation ou de l’émancipation des mentalités dans leur rapport au fait colonial (passé et présent). Donc, la principale question que nous soulevons ici, et à laquelle nous tenterons de répondre, est celle-ci : Comment penser la responsabilité du Sujet Africain à l’intérieur même de cette conscie