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François Héran : « L’Afrique subsaharienne migre moins que les autres régions du monde. »

Journaliste

Un mois avant sa leçon inaugurale au Collège de France où il vient d’être élu sur la chaire « Migrations et sociétés », le sociologue et démographe François Héran a reçu AOC pour évoquer ses recherches sur l’immigration et tenter de remettre à sa juste place cette question dans l’espace public.

François Héran délivrera le 5 avril prochain sa leçon inaugurale au Collège de France, où il vient d’être élu par ses pairs sur la chaire « Migrations et société ». Philosophe de formation puis titulaire d’une thèse d’anthropologie, François Héran est sociologue et démographe. Il a longtemps travaillé à l’INSEE puis à l’INED, qu’il a dirigé pendant plus de dix ans, institutions au sein desquelles il a mené des enquêtes sur la sociabilité, la formation des couples, les efforts éducatifs des familles, l’histoire familiale, la transmission des langues, la participation électorale et, surtout, sur l’immigration, qui est devenu au fil du temps son objet de recherche privilégié. C’est essentiellement d’immigration qu’il parle dans cet entretien qu’il nous a accordé dans les bureaux de son Institut Convergences Migrations, qu’il vient d’installer rue d’Ulm, au Collège de France.

Plus que beaucoup d’autres domaines, l’immigration offre l’occasion de mesurer l’écart considérable entre, d’un côté, l’état des savoirs partagés, au-delà des controverses scientifiques, et, de l’autre, la manière dont la question est posée dans l’espace public, notamment par les responsables politiques ou par les médias. Comment l’expliquer ?
Peut-on affirmer que l’opinion publique vivrait toujours dans l’illusion tandis que les chercheurs seraient maîtres du savoir ? C’est, hélas, un peu plus compliqué. Lorsque l’on demande aux Français quelle est la part d’immigrés dans la population, ils ont certes tendance à doubler, voire tripler la proportion réelle. Mais, en fait, ils prennent en compte la seconde génération, les enfants nés sur place de parents immigrés, ce qui double les effectifs. Et la présence importante de l’Outremer peut également influencer leurs perceptions… Une partie des biais de représentation sont explicables. On peut aussi noter que l’opinion est très sensible à certaines évolutions. En 1975 encore, 15% seulement des immigrés vivant en France venaient du monde arabo-musulman ;


Sylvain Bourmeau

Journaliste, directeur d'AOC

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