Petite histoire d’un réfugié en France ou le charme discret de l’arbitraire administratif
Connaissez-vous le charme discret de l’arbitraire administratif ? Laissez-moi vous raconter cette histoire. N. vient d’un pays en guerre qu’il a fui pour se réfugier en France dans les premières semaines de l’année 2017. Arrivant d’un pays lointain après bien des péripéties, N. pouvait-il se douter que l’administration française deviendrait bientôt pour lui cet adversaire aussi redoutable qu’obstiné à rythmer d’obstacles son chemin vers une existence enfin sereine ? Ah, parlons-en, de cette « administration française » ! Paradoxale unification terminologique, chimérique unité pour rendre compte de ces labyrinthes de couloirs qu’il faut parcourir, de ces torrents de formulaires à remplir et de cette jungle de textes qu’il faut défricher en dépit de leur inextricable complexité.

Mais revenons à N. N. ne veut rien de mieux que pouvoir mener en France la vie banale d’un homme qui travaille et paie ses impôts, comme tout le monde. Tandis que les molosses de la grande meute des xénophobes, de l’extrême-droite à la gauche de droite, aboient pour qui veut l’entendre qu’il faut que les réfugiés s’ « intègrent », N. leur répond qu’il ne demande que ça. Mais pour pouvoir chercher un travail et le garder, il lui faut obtenir le droit de conduire une voiture. Chance : N. sait conduire une voiture, et dispose même d’un permis de conduire délivré il y a quelques années maintenant par les autorités de son pays d’origine.
Confiant, N. s’informe sur la manière dont il peut demander la conversion de son permis étranger en un permis français. Plusieurs de ses amis, qui viennent du même pays que lui, ont déjà obtenu une telle conversion, au terme d’une procédure apparemment simple. N. n’a donc aucune raison de s’inquiéter : quelques courriers et la chose devrait être promptement réglée. D’ailleurs, N. est un homme organisé et ne traîne pas pour engager les démarches nécessaires.
Un peu plus de huit mois après son arrivée sur le territoire français, N. s’est vu reconnaître la qualité de