Art Contemporain

Rien d’édifiant – à propos de l’exposition de Sarah Tritz au Crédac d’Ivry

Critique

C’est à une assemblée bien particulière que nous convie Sarah Tritz : au sein de ce parlement, les points de vue s’échangent sans qu’on n’y comprenne rien, comme autant de perspectives que nous nous essayons à prendre les uns sur les autres. On y regarde comme on y est regardé ; les œuvres se contournent et alors se redécouvrent ; et Sarah Tritz prend un malin plaisir à interroger nos incompréhensions, face à un grotesque qui n’attend pas de réponse, ou, plutôt, auquel seuls les corps peuvent réagir.

Arrivé dans la grande salle du Crédac d’Ivry, là où débute l’exposition de Sarah Tritz « J’aime le rose pâle et les femmes ingrates », on s’assoit par terre. On ne va pas vous résumer le début, tout est décrit ici. Ce besoin de se poser au sol, à ras de vision, est peut-être motivé par la présence de petites marionnettes acéphales et vêtues comme des enfants, installées assises et debout au milieu de la pièce, suspendues par d’immenses fils (TRISTZ INSTITUTT, 2019). On se met à niveau. Ou, peut-être mieux, cette pulsion étymologiquement « considérative » vient-elle de la présence de maquettes et d’un tas de « modèles » figuratifs, réduits ou agrandis. Ils invitent, semble-t-il, à participer, à s’installer. Une hospitalité qui fait de nous les membres d’un parlement à géométrie variable.

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Un parlement, c’est-à-dire une assemblée où l’on discute. Car, invitée à donner une exposition monographique, Sarah Tritz décide généreusement de mêler son travail à celui de vingt-neuf autres artistes. Il y a des dialogues, des signes, on passe d’une œuvre à l’autre sans à-coup : on compte beaucoup ici sur le corps et l’espace physique. D’une certaine façon, « J’aime le rose pâle et les femmes ingrates », mené en trois temps selon les trois salles du Crédac, est un espace public où tout peut arriver. A côté des cinq petites marionnettes du TRISTZ INSTITUTT (version actuellement exposée au Prix Ricard ici), on trouve ainsi une Black Box (2015) de l’émirien Hassan Sharif (1951-2016) : boîte en carton « précaire », comme l’écrit Claire Le Restif, directrice du Crédac et curatrice du Prix Ricard cette année, imitant un bien de consommation désirable et infime, qui déborde de colifichets en aluminium, papier mâché, fils et autres matériaux pauvres, dont un bout de béton. Juste à côté, posé sur un sac plastique, le Petit tapis à points noués (2019) du tout jeune Paul Bourdoncle, objet dérisoire et minutieux, réalisé selon une technique complexe.

Ces trois œuvres se répondent év


Éric Loret

Critique, Journaliste