Il faut sortir du déni écologique
La manière dont nous nous représentons le monde est nécessairement mal ajustée. Eu égard aux flux qui le façonnent nous sommes comme des soldats ne percevant d’un conflit en cours que le tumulte autour d’eux, et cherchant néanmoins à en inférer l’issue finale de la bataille. Il y a là un état de fait indépassable, une marque de la condition humaine. Mais il en va cependant autrement quand l’écart entre représentations et réalité s’accroît au point de devenir dangereux et destructeur. Et ce phénomène peut se produire de deux façons, soit lorsque les représentations excèdent de loin le réel, soit lorsqu’elles conduisent à sous-estimer jusqu’à la dénégation des pans entiers de la réalité. Le transhumanisme illustre à merveille cette logique discursive où la promesse se substitue au réel au point de le masquer. Quant aux facteurs écologiques, ils semblent prédestinés à une forme effective et quasi universelle de déni.
Promettre l’immortalité au genre humain alors que la planète ploie sous la masse de huit milliards d’êtres humains, et que 60 % d’entre eux disposent d’au maximum 7 $ par jour, que la rapidité de croissance démographique en Afrique est telle qu’elle interdit d’avance toute évolution au prorata des structures matérielles, etc., relève d’un cynisme plus ou moins avoué. Promettre l’exode de l’humanité sur une planète Mars terraformée au moment où l’on s’emploie à détruire les fruits de la terraformation de la Terre elle-même (qui aura duré un milliard d’années…) est proprement pathétique. Ce discours de milliardaires déjantés, les Musk et autres Bezos, n’aide nullement la plupart des gens à conquérir une lucidité minimale quant à la situation qui nous échoit. Il est difficile de discerner autre chose dans de pareils discours qu’un écran de fumée destiné, en nous octroyant des capacités que nous n’avons pas, à nous détourner d’un état du monde alarmant comme nous le rappellent à un rythme resserré de nombreuses études scientifiques, et tout récemmen