Survival : Bob Marley 40 ans après Le Bourget
Le 3 juillet 1980, Bob Marley donnait un concert historique à plus d’un titre. En raison de son emplacement : un vaste terre-plein proche des pistes du Bourget. Ensuite par le nombre de spectateurs payants, 47 000, un record pour pareil événement en France à l’époque. Pour donner une idée, trois semaines plus tôt, au même endroit, le pape Jean Paul II n’avait rassemblé que moitié moins de fidèles pour une messe en plein air (gratuite). Ce dont ne manqua pas de se gausser Coluche, alors en campagne électorale, pour qui le reggae et le rastafarisme étaient tout bonnement en passe de remplacer les chants liturgiques et le catholicisme. La recette volée – ou déclarée telle par les organisateurs – complétera la singularité du moment.

Mais pour qui y assistait, ce concert avait surtout ceci d’exceptionnel qu’il réunissait pour la première fois en un même lieu une foule immense et intensément bigarrée. Jamais dans l’histoire de ce pays ne se proposa à une telle échelle une aussi parfaite représentation de ce qui constitue sa diversité. Français de souche et afro-descendants, potes de banlieues, dealers de shit et ménagères de plus de 50 ans, bobos accrédités, cadres lambdas, quidams de province, soustraits le temps d’un après-midi à l’angle mort d’un corps social pas encore démembré, tous se pressaient sous un soleil longtemps hésitant au pied d’un échafaudage afin d’assister à l’ultime prestation du premier, et à ce jour dernier, artiste de dimension vraiment universelle. C’était il y a 40 ans, dans un pays encore insouciant. Loin, à des années lumières, de celui que nous connaissons aujourd’hui, à la psyché brisée, perclus de rhumatismes identitaires, sujet à des tensions raciales, religieuses, culturelles, où beaucoup de ce qui faisait (ou croyait faire) socle commun s’est largement fissuré.
Bob Marley est un beau sujet d’article. On tire toujours une joie sereine à écrire sur le héros de ceux qu’on appelle, avec compassion ou pas, « les vaincus de l’Histoire ». Lui qu