Politique culturelle

Archambault & Baudriller : « L’expérience de l’arrêt d’un festival ou d’un théâtre peut aider à accélérer ou radicaliser des changements »

Journaliste

En 2003, le mouvement des intermittents avait conduit à l’annulation pure et simple du Festival d’Avignon. L’année suivante, Hortense Archambault et Vincent Baudriller prenaient les rênes de la manifestation et lui donnaient pour dix ans une formidable impulsion. Aujourd’hui directrice de la MC93 à Bobigny et directeur du Théâtre Vidy-Lausanne, ils entendent se saisir de l’opportunité provoquée par le coup d’arrêt dû à la pandémie.

En juillet 2004, Hortense Archambault et Vincent Baudriller ouvraient leur première édition d’Avignon – ils en piloteront dix au total, remarquables à bien égards, et qui allaient marquer durablement l’histoire du Festival. L’année précédente, le mouvement des intermittents avait conduit à l’annulation spectaculaire de la manifestation. Tout était à reconstruire après ce brusque coup d’arrêt, une aubaine pour ce duo alors trentenaire, l’occasion d’infléchir la politique artistique tout en l’inscrivant naturellement dans l’héritage d’Alain Crombecque et Bernard Faivre d’Arcier. Au printemps 2020, ce sont les théâtres qu’ils dirigent – la MC93 pour Hortense Archambault, Vidy-Lausanne pour Vincent Baudriller – qui, à l’instar de tous les lieux publics, ont dû soudainement baisser leurs rideaux. Comment dès lors reprendre ? Quelles leçons tirer de leur expérience 2003-2004 ? SB

À quoi ressemblent vos théâtres aujourd’hui ?
Hortense Archambault — En mars, nous avons dû soudainement tout arrêter, et à cette fermeture brutale succède depuis quelques semaines une réouverture lente, par étape, qui rend le moment très beau. Aujourd’hui, on atteint pratiquement une forme de normalité, mais on reste prudent. L’une des grandes difficultés pour moi ce fut de ne pas pouvoir tout rouvrir d’un coup parce que le projet de la MC93 est bien d’être un lieu très ouvert. Il nous faut accepter et apprendre cette lenteur.
Vincent Baudriller — Pour le Théâtre Vidy-Lausanne, c’est particulier parce que le confinement est survenu la veille de la fermeture pour rénovation du bâtiment historique. Mais là aussi ce fut brutal, à la veille du festival « Programme commun », pour lequel quatre créations en répétition ont été fauchées à quelques jours de leur première… C’était particulièrement violent pour l’équipe et les artistes. Finalement, nous avons rouvert début mai en préparant le démontage et le déménagement du théâtre. Et nous essayons de planifier la saison prochaine en gérant l’incertitude


Sylvain Bourmeau

Journaliste, directeur d'AOC