Le temps du courage – Macron trois ans après
La rentrée, surtout après le récent changement de gouvernement, est pour tout citoyen l’occasion de faire le point. Il y a un peu plus de trois ans, dans l’entre deux tours, j’avais exposé dans La Croix trois des motifs pour lesquels je me préparais à voter pour Emmanuel Macron. Je connaissais ce dernier pour l’avoir connu chez Paul Ricœur et autour de ce dernier, notamment au moment du centenaire du philosophe et de la création du Fonds Ricœur à laquelle j’ai œuvré.
Je voudrais dire d’emblée le respect que je garde à son égard, notamment autour de certains aspects de sa politique extérieure. Je souhaite cependant ici revenir de manière réflexive sur ces trois motifs, dans le même ordre que celui d’alors, pour mesurer l’écart entre ce que cette élection me semblait promettre, et les réalisations jusqu’ici effectives. Je terminerai par quelques observations sur cet écart lui-même, ce qu’il signifie pour notre génération et notre époque.
Constituer un espace politique respectueux : le Prince et le Magistrat
Le premier de ces points porte sur notre conception du politique. Je savais qu’Emmanuel Macron avait travaillé sur Machiavel avec le philosophe Etienne Balibar. À l’encontre d’un machiavélisme excessif de la pensée politique française, Ricœur écrivait : « l’État moderne, dans nos sociétés ultra pluralistes, souffre d’une faiblesse de la conviction éthique (…) Je pense en particulier à des pays comme la France, où la réflexion philosophique aussi bien que la production littéraire sont fascinées par les problématiques non-éthiques si elles ne sont pas anti-éthiques (…) Le danger, de nos jours, me paraît beaucoup plus grand d’ignorer l’intersection de l’éthique et de la politique que de les confondre[1]».
Plus profondément, l’idée de son fameux texte de 1957, après le coup de Budapest, « Le paradoxe politique », était qu’il fallait penser la rationalité spécifique du politique pour penser aussi son irrationalité spécifique. Pour développer ce point à ma ma