Universalisme, colorblindness et discriminations racialisées dans le monde de la santé

Au mois d’août 2020, plusieurs évènements se sont télescopés, autour de logiques racialisées révélant différentes logiques conceptuelles, historiques et sociales, qui génèrent des attitudes opposées dans la façon de s’opposer aux discriminations. Passage en revue.
1. Franz Fanon sur France Culture
Commençons par l’excellente série d’émissions d’Anaïs Kien sur France-Culture, « Franz Fanon, l’indocile », qui nous a permis d’entendre un extrait de la conférence de Frantz Fanon, « Racisme et culture », au Congrès international des écrivains et artistes noirs le 20 septembre 1956, où il déclare : « Le racisme est bel et bien un élément culturel. Il y a donc des cultures avec racisme et des cultures sans racisme. » Fanon, né en Martinique en 1925, s’est engagé à l’âge de 17 ans en 1943 aux côtés des forces de la France Libre, pour défendre « la liberté et la dignité de l’homme ». Il est blessé dans les Vosges et décoré. Après la guerre, il fait des études de médecine à Lyon tout en menant des études de philosophie. Dans l’armée de la France libre, puis en métropole, il se trouve confronté au racisme.
Il écrit Peau noire, masques blancs, publié en 1952, qui reste d’une brûlante actualité. Voici ce qu’il écrit sur son expérience. « Notre médecin est un Noir. Il est très doux. C’était le médecin nègre ; moi qui commençais à me fragiliser, je frémissais à la moindre alarme. Je savais, par exemple, que si le médecin commettait une erreur, c’en était fini de lui et de tous ceux qui le suivraient. […] Le médecin noir ne saura jamais à quel point sa position avoisine le discrédit. Je vous le dis, j’étais emmuré : ni mes attitudes policées, ni mes connaissances littéraires, ni ma compréhension de la théorie des quanta ne trouvaient grâce[1]. » De 1953 à 1957, Fanon est psychiatre en Algérie, à l’hôpital Blida, où il accueille des Algériens et des Français pris dans la guerre. Il rejoint le FLN à Tunis en 1957, où il écrit Les Damnés de la terre peu avant sa mort en 1961.