International

Portrait de Trump en malade imaginaire

Professeur de littérature et d'histoire des médias

Rediffusion édition du 1er mai : Du Malade imaginaire de Molière à Donald Trump, il n’y a qu’une réplique : « You are fired ! », dans une relecture pas si baroque des intrigues de la Maison Blanche. À l’heure où le président américain a nommé son médecin ministre, il campe un Argan plus que convaincant, monopolisant la scène et la parole. À quand la tombée de rideau ?

Depuis que Donald Trump a remplacé son ministre des Vétérans, Monsieur David Shulkin, par l’honorable Docteur Ronny L. Jackson, qui officiait jusqu’à présent comme son médecin personnel, il faut se rendre à l’évidence. Le service des spectacles de la Maison Blanche nous propose non seulement chaque semaine un nouvel épisode de The Apprentice, une téléréalité dans laquelle Monsieur Trump continue de tenir la vedette en assénant hebdomadairement à un participant un jubilatoire You are fired, mais également un remake du Malade imaginaire de Molière. Et dire que certains prétendent que la culture française aurait cessé de rayonner.

Publicité

Il faut évidemment transposer un peu les choses, mais quand même, il n’y a pas beaucoup de médecins personnels de chefs d’État qui ont été bombardés ministres. Et c’est vrai encore que les vétérans, ce n’est pas un ministère stratégique, mais est-on sûr que d’ici une semaine ou deux le Docteur Jackson ne va pas remplacer l’un ou l’autre général officiant actuellement comme chef de cabinet ou des armées ? Ce ne seront plus les vétérans qui seront mis au service de la santé du Président, mais le gouvernement tout entier, ou les armées, et qui sait ce qui arrivera alors. Imaginez le ministre de la Défense lisant toutes les semaines le bulletin de santé du Président pour rassurer les citoyens sur leur sécurité. Il va bien, il ne déjante pas trop, il n’est pas encore totalement tapé, vous êtes en sécurité.

Toxicomanie plutôt que maladie : la visibilité est sa dope, ce n’est pas pour rien qu’il a fait ses classes dans une téléréalité.

À l’école, on apprend en général que Le Malade imaginaire, c’est l’histoire d’un type qui croit qu’il est malade, mais en fait il irait très bien, et donc ce serait amusant puisque c’est une comédie. Mais comment ne pas voir qu’Argan ne va pas bien du tout, et surtout qu’il empêche tout le monde autour de lui de fonctionner à peu près normalement ? Argan est au cœur, il est le cœur (comme on le dit d’un réa


Vincent Kaufmann

Professeur de littérature et d'histoire des médias, MCM-Institute de l’Université de St. Gall, Suisse