L’âge des possibles périls – sur une série de films de « La Lucarne » d’Arte
Contre à la fois l’évidence d’une observation globale crispante et la mauvaise foi de ses sévères contempteurs, la télévision française accorde parfois, dans les marges nocturnes de ses grilles, une petite place à des images qui tranchent avec le tout-venant de l’information spectacularisée et des récits formatés. À n’en pas douter, « La Lucarne » incarne depuis plus de vingt ans l’une de ces fenêtres télévisuelles audacieuses, dont la longévité procède en partie de la discrétion forcée.
Créée en 1997 par Thierry Garrel, alors directeur de l’unité documentaire de la chaîne Arte, pour accueillir des films à part, expérimentaux et libres, « La Lucarne », dirigée par Luciano Rigolini jusqu’en 2015, puis par Rasha Salti, a permis de découvrir des écritures à rebours des codes obsessionnels du paysage télévisuel, de ses cadres narratifs et de ses cadrages esthétiques répétés (docufiction, reconstitution, enquête, archive retravaillée, témoignages…). Sans négliger aucun des modes d’écriture en question (l’archive, le témoignage, l’intime, par exemple y sont souvent mis en jeu), la majorité des films de « La Lucarne » échappent, dans leur diversité même, à une quelconque forme prédéfinie, préférant inventer à chaque fois un monde et un récit affranchi des règles établies. Aucun d’entre eux ne se ressemblent, ni ne ressemblent à ceux des autres cases, mieux exposées.
En vrac, des films inouïs n’ont cessé d’en témoigner : ceux de cinéastes déjà confirmés, comme Alain Cavalier, Tsai Ming-liang, Wang Bing, Apichatpong Weerasethakul ou Chantal Akerman, ou d’autres révélés par cette « Lucarne », tels Naomi Kawase, François Caillat, Lech Kowalski, Vincent Dieutre, Claudio Pazienza, Arnaud des Pallières, Clément Cogitoire ou David Teboul, parmi tant d’autres.
La diffusion de trois soirées spéciales en décembre, constituées chacune de trois films, regroupées dans une thématique globale, « No Limits », est l’occasion de prendre la mesure de cette créativité renouvelée au