Rediffusion

Patrick Chamoiseau : « On n’a pas besoin d’universel, on a besoin de Relation »

Historienne de l'art contemporain

Avec son nouveau livre, Le conteur, la nuit et le panier, l’écrivain et intellectuel martiniquais Patrick Chamoiseau poursuit sa quête de ce qui fonde et constitue le geste créatif. Il met en scène un conteur créole, qui se lève au cœur de la plantation, parmi les esclaves, et les dote d’une parole commune. Il incarne le règne du sensible dans le rapport que l’on entretient au « réel », l’accès par le « je » à un « nous », cette autre manière de vivre au monde et de vivre le monde, non plus entre des frontières, des nations exclusives, ou des absolus culturels, mais dans l’interaction avec tout le vivant. Rediffusion du 27 mars 2021

publicité

Avec Le conteur, la nuit, le panier, son nouveau livre, l’essayiste et romancier martiniquais Patrick Chamoiseau propose un voyage poétique et galactique qui prend son essor au fond des ténèbres et s’élance dans le cosmos étoilé. Ce voyage est celui qui traceles voies et les voix de la création. L’artiste y apparaît comme l’éclaireur du monde, celle et celui par qui le concept de « Personne » peut exister dans une généalogie longue et une histoire immémoriale. Patrick Chamoiseau raconte l’état poétique qui s’entrechoque avec ce qu’il nomme une esthétique de la « catastrophe », et il choisit pour cela la figure du conteur qui prend la parole la nuit sur la plantation esclavagiste et qui fait étinceler les mots. L’expérience de la création et de sa réception est un chemin solitaire et solidaire, selon cette union unique de deux mots faux jumeaux que Patrick Chamoiseau propose, à partir d’Edouard Glissant, pour saisir la nécessité d’une mondialité. Lors de cet entretien, voix mêlée aux langages artistiques, le poète, philosophe, écrivain et conteur, observateur sans cesse aux aguets, fait le récit de ces connaissances mouvantes et mobiles qui se rattachent à une esthétique transfigurée. EZ

Votre nouveau livre semble en rotation autour de quatre points de gravitation : le tremblement de terre que vous expérimentez à la Martinique, l’action extraordinaire de votre mère Man Ninotte après les cyclones, et les deux analyses époustouflantes que vous conduisez à partir du Cahier d’un retour au pays natalde Césaire et du lexique conceptuel et poétique de Glissant. Diriez-vous que ces expériences personnelles se mêlent à deux expériences poétiques pour en créer une nouvelle ?
J’ai tenu la chaire de créativité à Sciences Po à Paris durant un semestre en 2020 et cela m’a obligé à interroger les fondements de ma propre créativité. D’examiner de plus près ma boîte à outils en quelque sorte. C’est vrai que j’ai toujours été intrigué par le mystère de la création artistique


Elvan Zabunyan

Historienne de l'art contemporain, Professeure à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne et critique d’art