Récits avec figures
Meilleures salutations
Qui sait à qui il allait écrire les cartes postales. Il y réfléchit et se demanda s’il n’était pas opportun de faire une liste, parce qu’ensuite on arrive sur place et on oublie. Il prit un bout de papier dans le tiroir du bureau, s’assit et commença d’écrire des noms et des adresses. Il alluma une cigarette. Il écrivait un nom, y réfléchissait, tirait une bouffée de fumée et écrivait un autre nom. Quand il eut fini il recopia les noms dans un agenda et déchira le bout de papier. Il plaça l’agenda sur les chemises, dans la valise encore ouverte. Il regarda autour de lui, parcourut toute la pièce des yeux comme s’il cherchait quelque chose qu’il pouvait avoir oublié, parce que le voyage allait être long. Puis il se souvint des cartes postales qu’il avait achetées dans une galerie d’art et qu’il avait laissées sur un rayonnage de la bibliothèque. Il se mit à les regarder l’une après l’autre, pour voir si elles étaient en accord avec le voyage qu’il s’apprêtait à faire. Pas tellement, se dit-il, elles ne correspondent pas vraiment, quel sens a une carte des Marches, si je l’expédie d’Amérique du Sud. Mais il pensa ensuite que la beauté tenait aux timbres qu’il y mettrait, au Pérou par exemple il achèterait des timbres avec des perroquets, il y avait certainement des timbres avec des perroquets, dans ce pays, et aussi avec le visage de divinités précolombiennes, des masques souriants et indéchiffrables, tout en or et en émail, il avait vu autrefois une exposition au palais royal, il est probable que ces objets figuraient aussi sur les timbres. Et même, l’idée le divertit, étant donné que les banales cartes postales illustrées, celles pour les touristes, sont tellement moches, avec des couleurs toujours criardes, un peu fausses, et puis toutes pareilles, qu’elles viennent du Mexique ou d’Allemagne. De la sorte c’était beaucoup plus original : une carte où était écrit « d’Ascoli » et qui au contraire vient d’Oaxaca ou du Yucatán ou de Chapultepec