Vieil océan – à propos de Six continents ou plus au Palais de Tokyo

C’est à un voyage dans le temps et dans l’espace que nous invite la nouvelle saison du Palais de Tokyo. Une promenade qui se tient également dans des imaginaires, bercés d’aventures collectives, de « pratiques prophétiques », d’une histoire du militantisme et d’un booty shake.
Six continents ou plus a l’ambition de nous faire visiter de nouveaux territoires et de faire du centre d’art une Atlantide, par sa simple présence, dans un espace « ou plus ». L’art, cet empire sur lequel le soleil ne se couche jamais, va pourtant s’ancrer dans notre monde d’aujourd’hui, bien réel. Il s’agit par cette saison de « décentrer notre regard », comme cela nous est proposé avec Maxwell Alexandre, mais aussi de nous inviter à faire face à un militantisme sans fard, à l’image de « Pretos no topo » [« Les Noirs au sommet »], hymne de l’artiste devenu un slogan de la communauté hip hop de Rio de Janeiro.
Actualiser les luttes d’autrefois
Deux expositions se répondent dans les archipels curatoriaux du Palais de Tokyo : « Ubuntu, un rêve lucide » et « Sarah Maldoror : Cinéma Tricontinental ». Sur les cimaises, deux phrases tissent un lien intime entre les espaces. Les deux expositions devaient originellement se suivre et non se côtoyer. Le lien s’écrit dans l’affirmation de la cinéaste Sarah Maldoror à laquelle l’exposition rend hommage : « Je suis noire », une affirmation récurrente et qui a écrit le paysage intellectuel de l’auteure. Celle-ci résonne dans la traduction aux accents universaliste du terme « ubuntu » : je suis parce que nous sommes.
Ubuntu, projet curatorial de la commissaire Marie-Ann Yemsi, s’inscrit selon ses propres termes dans cet espace « encore infréquenté de nos imaginaires », un lieu que je méconnais radicalement, et qui semble s’inscrire dans une découverte permanente. L’ouverture heureusement toujours plus grande à un regard post-colonial de l’histoire de l’art nous permet une nouvelle approche des géographies artistiques, laquelle n’est pas sans rappe