Se sentir plus vivant – sur Vide Sanitaire de François Durif
François Durif est-il artiste, croque-mort, écrivain ? Son récit Vide sanitaire, publié par les Éditions Verticales, nous renvoie à chacune de ces occupations en racontant les promenades-performances littéraires qu’il réalise dans les cimetières, emmenant un petit groupe d’inconnu·es au fil des mots et des pas entre les tombes. Il arpente un terrain qu’il connaît bien, en ancien professionnel des pompes funèbres. Le temps de sa promenade dans le cimetière, il revêt cet habit de croque-mort, si bien qu’il s’agit également pour lui d’une balade dans le temps, dans ses années passées au métier.
Mais s’il est artiste, pourquoi un tel besoin de littérature pour ré-endosser ce costume de « maître de cérémonie » ? Peut-être parce que ce passé dans les pompes funèbres avait quelque chose d’une inscription, comme celles qui ornent les tombes. Plus significativement, une inscription dans la société – et qui est autant une façon de se remémorer et d’être remémoré.

L’art est plus invivable que la mort…
À cette place de croque-mort, finalement, il y aura également des choses laissées derrière soi comme le fait un artiste, des choses plus terre-à-terre (voire six pieds sous terre). Mais ces choses auront compté, de façon franche et nécessaire, pour ces gens croisés au moment charnière d’un deuil, d’un passage sous la terre ou dans le feu de la crémation. Pour le personnage délicat que dessine le récit, habité par un doute et une forme de risque permanent – risque accru à l’endroit de l’art – que tout s’effondre, que tout s’enlise, que tout dysfonctionne, l’habit du croque-mort est à la fois une grande responsabilité et un grand soulagement.
C’est un souffle possible : après la mort des gens, il y a comme une occasion de se sentir plus vivant. C’est une question de place. Non qu’on se trouve trop serré et trop en concurrence dans nos relations humaines – bien que le texte fasse état de ce qui serait l’équivalent d’une tension immobilière pour les mort·es, la réduction de