Thomas Sauvin : « Il y a quelque chose de magique avec la photographie anonyme »
À la fin des années 2000, alors basé à Pékin et parce qu’il parle chinois, Thomas Sauvin commence à travailler pour Archive of Modern Conflict, un immense fonds, consacré à l’origine à la photographie de guerre anonyme ou vernaculaire, initié par un collectionneur canadien particulièrement discret. Après plusieurs années, lassé par la fastidieuse constitution d’une collection de photographie contemporaine chinoise, davantage inspiré par la pratique initiale de la collection qui l’emploie comme par celle d’Erik Kessels, un éditeur néerlandais, déroutant spécialiste de photographie trouvée orientée absurde, il traîne sur les marchés aux puces et chine sur les internets de son pays d’adoption à la recherche d’images-pépites. Il trouve un filon dans une zone de recyclage au cinquième périphérique nord de Pékin où il convainc un recycleur de négatifs destinés à être physiquement dissous dans l’acide pour en récupérer le nitrate d’argent de plutôt les lui vendre au kilo.

Depuis, il collectionne les négatifs en obsessionnel, ce qui lui a permis de constituer sa propre archive, Beijing Silvermine, un fonds qui contient à ce jour plus d’un million d’images qu’il considère avoir « adoptées » et par conséquent valorise, édite, diffuse et dont il porte la responsabilité. Alors que le réalisateur Emiland Guillerme vient de consacrer un documentaire au projet prochainement projeté au Musée Guimet à Paris et que les éditions La Martinière publient ces jours-ci un opus de la collection Percevoir à son sujet, nous sommes revenus avec Thomas Sauvin, aujourd’hui artiste, collectionneur et éditeur, sur cette aventure d’exhumation au long cours parmi les micro-histoires sédimentées, entre (auto)censure et propagande mais surtout au cœur d’une certaine Histoire pékinoise des années 90, authentique, intime et domestique. OR
Qu’est-ce que Archive of Modern Conflict ? Pourquoi cette collection de photographies, pour laquelle vous avez longtemps travaillé, est-elle aujourd’hui si i