Numérique

Réparation des smartphones : un écosystème de soin des objets matériels

Artiste, Anthropologue

Parmi les biens de consommation contemporains, les appareils numériques connaissent une fréquence de remplacement importante. Face à ce phénomène, les politiques publiques mettent l’accent sur des démarches multiples, du droit à la réparation au soutien à des initiatives diverses comme les cultures makers. Si celles-ci sont fondamentales, il ne faudrait pas négliger le rôle singulier de tout un écosystème généralement méconnu, particulièrement présent dans le cas des smartphones, et prenant essor dans les boutiques de réparation indépendantes.

Au cœur des débats contemporains sur la numérisation de la société, la question de l’obsolescence rapide des équipements numériques occupe une place croissante dans les enquêtes journalistiques et les travaux de recherche. Cette obsolescence est étroitement liée au fait que les équipements numériques sont soumis à un régime d’innovation permanente. Régime dans lequel les processus d’invention et de diffusion de nouveaux produits et services ont été adaptés aux valeurs de l’économie actuelle, favorisant une production flexible, personnalisée et donc sans cesse renouvelée. Cette versatilité se traduit par les taux élevés de remplacement d’appareils dont le smartphone est sans doute le plus remarquable, mais qui concerne aussi les ordinateurs, les téléviseurs et autres consoles de jeux vidéo.

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Les statistiques d’usages sont éloquentes à cet égard. Un rapport de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) datant de 2021 indiquait que, suivant les sources, la durée d’utilisation individuelle des smartphones est évaluée entre 23 mois et 37 voire 40 mois, « toujours éloignées des 5 voire 10 ans que plusieurs des acteurs rencontrés par l’Arcep ont estimés comme une durée de vie potentielle des terminaux mobiles ».

Cette situation interpelle à plusieurs égards, en particulier sur la difficulté à concilier les velléités de la « transition numérique » (qui correspond à la transformation des processus organisationnels au moyen des technologies de l’information et de la communication) avec les impératifs de redirection environnementale. Le même rapport ainsi soulignait qu’outre les émissions de gaz à effet de serre liées à l’usage du smartphone, l’extraction minière impliquée dans la production des terminaux est problématique à double titre. D’abord socialement, puisqu’elle est liée à des risques majeurs en matière de droits humains, incluant le travail des enfants et l’exploitation des populations imp


Anaïs Bloch

Artiste, Chercheuse au sein de la Haute école d’art et de design (HEAD – Genève HES-SO) et enseignante à l’École romande d'arts et communication

Nicolas Nova

Anthropologue, Professeur à la Haute école d’art et de design (HEAD – Genève HES-SO)