Concurrence et plateformes : le retour du politique ?
Dans l’ensemble des pays démocratiques, l’hégémonie des grandes plateformes sur les marchés numériques suscite une inquiétude croissante, à laquelle viennent répondre de nouvelles règlementations publiques. Si les regards sont ici tournés vers la Commission européenne et l’adoption récente du paquet législatif relatif aux services numériques – le Digital Services Act et le Digital Market Act – , les choses bougent également de l’autre côté de l’Atlantique. Et l’innovation vient d’un lieu qu’on imagine mal secoué par la flamme de la régulation : la Federal Trade Commission, vieille endormie chargée depuis 1914 du contrôle des pratiques anticoncurrentielles aux États-Unis, semble avoir déclaré la guerre aux plateformes.

Depuis 2020, une série de plaintes a été déposée contre Facebook, pour « attitude anticoncurrentielle en vue de maintenir une position dominante sur le marché des réseaux sociaux numériques »[1]. Elles mettent notamment en cause les rachats d’Instagram en 2014 et de Whatsapp en 2016, ainsi qu’un ensemble de pratiques discriminantes imposées aux développeurs se branchant aux interfaces du groupe. Cet été, la FTC a également cherché à bloquer le rachat de la société Within, pionnière dans les casques de réalité virtuelle, une acquisition jugée stratégique pour Facebook dans le cadre du projet « Metaverse ».
C’est bien la première fois que la FTC intervient contre le rachat d’une petite start-up, le contrôle des fusions-acquisitions s’opérant d’habitude à l’encontre de rapprochements entre groupes de dimensions comparables. Loin d’en rester là, plusieurs enquêtes visant les autres géants de la tech – Google, Amazon et Apple – sont en cours à la FTC, affirmant la volonté de l’institution de mieux encadrer le pouvoir des GAFA, et leurs conséquences sur la vie économique et sociale du pays.
« Révolution idéologique » dénoncent ses nombreux détracteurs, « révolution politique » pour ses partisans, l’offensive de la FTC signale surtout une transforma