Le musée, l’art et la vie : réflexions sur une nouvelle forme d’activisme écologique

Mêmes visages fermés, même détermination, même mode opératoire, même génération : pendant que la sécheresse frappait l’Europe, on a vu apparaître cet été, d’abord à Londres, puis sur le reste du continent et jusqu’à Melbourne, une nouvelle forme d’actions spectaculaires conduites par des collectifs aux noms sans équivoque – Just Stop Oil, Extinction Rebellion, Ultima Generazione, Letzte Generation – et visant à alerter l’opinion sur le désastre écologique. Après s’être introduit dans un grand musée international – de type National Gallery ou Galerie des Offices – un couple s’approche d’un tableau mondialement connu et de la plus grande valeur – Pêchers en fleurs ou Tournesols de Van Gogh, Meules de Monet, Printemps de Botticelli – l’asperge parfois d’une substance alimentaire courante et peu ragoutante – soupe ou purée –, se colle les mains sur le cadre ou la vitre qui le protège, et déclame un texte qui, tenant à la fois de la justification, du manifeste et du questionnement, vise à éveiller les consciences en mettant en regard les valeurs respectives de l’œuvre et de la vie sur Terre. L’objectif n’est pas de détruire, il est d’adresser une alerte, en faisant confiance à la puissance sensible de l’acte et à la vitesse de propagation des images, enregistrées par les militants eux-mêmes[1].
Connaissant une fréquence accrue depuis le mois d’octobre, ces actions ont été et sont encore aujourd’hui largement relayées et commentées, aussi bien dans les médias que sur les réseaux sociaux. Si beaucoup de choses ont déjà été dites, aussi bien de l’ordre de l’analyse que du jugement, sur un ton parfois condescendant voire franchement réprobateur, il me semble que l’on n’a pas pris la pleine mesure des enjeux, faute d’avoir d’une part tiré toutes les conséquences du choix de la cible artistique et muséale et, d’autre part, d’avoir prêté une attention suffisante au mode opératoire.
Outre qu’il permet d’atteindre un nouveau public « préoccupé par la crise environnement