Open design : produits sans qualités
Une des conséquences, parmi d’autres innombrables, des quatre révolutions industrielles[1] qui se sont succédé depuis le XVIIIè siècle est l’établissement et le renforcement progressif d’une disjonction entre production et consommation (au sens d’abord étymologique du terme : du latin consummaciun [v. 1120] « état de ce qui est mené à son accomplissement, à sa perfection », emprunté du latin chrétien consummatio « achèvement, couronnement, fin, terminaison ») — de l’affirmation d’une dichotomie que beaucoup disent originaire, première, sur laquelle reposerait toute l’économie de marché (polarité de l’offre et de la demande). Certains, d’un côté, décidant de produire ce que d’autres, de leur côté, décideront de consommer ; se revendiquant chacun en tapinois d’une plus grande influence, les deux parties entendent en réalité décider du sort de l’autre.
Ce qui pouvait passer encore naguère en un même lieu, un même temps et parfois dans les mains d’un même homme (notamment celles de l’artisan) d’un état préliminaire, précaire – au cours des différentes étapes de confection, de fabrication, d’assemblage pour les choses matérielles – à un état achevé, accompli dans l’usage s’est alors vu progressivement distrait, aux limites de l’écartèlement. C’est aujourd’hui toute la société marchande, devenue société marchande capitaliste, puis « turbo-capitaliste » comme prise dans une certaine frénésie, qui repose sur cette division. Karl Marx l’aura excellemment décrit, analysé dès 1857 dans son Introduction générale à la critique de l’économie politique : il y signale le caractère irrésolu du départage production-consommation, à plusieurs égards symptomatique des maux d’une époque.
Ce que, au fil du temps, la production mécanisée, automatisée, distribuée et dorénavant largement « cobotisée » (collaboration Homme-Robot) aura fourni ou épandu, elle l’aura mené par le truchement d’une transformation d’échelle continue et quasi-exponentielle. Unité (quantité) et cadence (ryt