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En Irlande, le long chemin du droit à l’avortement

Maîtresse de conférences en civilisation britannique et études irlandaises

La large victoire du « oui » au référendum irlandais sur l’abrogation du 8ème amendement de la constitution interdisant l’IVG marque l’aboutissement d’un long processus historique et pourrait s’avérer le premier pas vers la réconciliation d’un pays longtemps divisé par cette question.

Le 25 mai 2018, 66,4% des 3,3 millions d’électeurs et électrices irlandais.e.s qui étaient appelé.e.s à se prononcer sur l’abrogation du 8ème amendement de la constitution, adopté lui aussi par voie référendaire le 7 septembre 1983, ont répondu « oui ». En 1983, 66,9% d’entre elles/eux avait voté pour insérer dans la constitution un texte qui allait, d’une part, resserrer les liens déjà étroits entre l’Église et l’Etat et, d’autre part, sceller le destin de milliers de femmes, contraintes de se rendre en Angleterre pour mettre un terme à une grossesse non désirée. Le chemin parcouru pour aboutir à ce résultat et lever l’un des derniers tabous de la société irlandaise a été long, difficile et bien trop souvent tragique.

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La criminalisation de l’avortement remonte à une loi britannique de 1861, l’Offences Against the Person Act, rendant passible d’une peine de prison à vie quiconque subirait ou aiderait à une femme à subir une interruption de grossesse. Lorsqu’en 1922, au terme de plusieurs années de conflit, l’Irlande accède à l’indépendance et devient l’État Libre d’Irlande, elle incorpore la loi de 1861 dans son arsenal législatif. En 1935, alors que l’enseignement social de l’Église catholique est érigé en véritable politique nationale, une autre loi, votée par le Parlement irlandais cette fois-ci, vient prohiber la vente, l’importation et la publicité de tout dispositif contraceptif sans pour autant en interdire l’utilisation. Pendant les décennies qui vont suivre, de nombreuses poursuites seront engagées à l’encontre de celles qui pratiquent des avortements clandestins. La plus célèbres de ces « faiseuses d’anges » fut une certaine Mary Ann, dite ‘Mamie’ Cadden, une ancienne infirmière, qui pratiqua des dizaines d’avortements clandestins dans les années 1930 et 1940 à Dublin. Elle fut finalement arrêtée, jugée et condamnée à la prison à vie en 1957, à la suite d’un procès retentissant.

C’est ainsi que, à partir de 1967, l’Irlande exporte son problème e


Nathalie Sebbane

Maîtresse de conférences en civilisation britannique et études irlandaises, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3

Mots-clés

IVG