De quoi parle le projet de loi sur les Fake News?

Le savant anglais Glanvill, un peu oublié aujourd’hui, aurait dit qu’il était plus facile de passer un fil dans le chas d’une aiguille au milieu de la cohue que de trouver la vérité au milieu d’une controverse. On a parfois le même sentiment devant le récent débat sur la post-vérité et les « fausses nouvelles » : il n’est pas certain que la notion de vérité en ressorte toujours éclaircie.
En apparence, le débat porte sur la qualité de l’information dans les démocraties et nous sommes invités à nous demander si la technologie a « chamboulé » le vrai, si le faux l’emporte, se propage plus vite, plus loin et plus profond que le vrai sur les réseaux sociaux, ou encore si nous serions devenus apathiques à l’égard de la vérité. Cette question, qui mérite d’être instruite pour elle-même, a connu plusieurs pics, les deux éléments décisifs étant sans doute le Brexit et la nature très particulière de la campagne présidentielle américaine de 2016. Le projet de loi, ordinaire et organique, actuellement en discussion à l’Assemblée, constitue dans le contexte français une raison supplémentaire de réfléchir à cette question.
Il mobilise, non pas bien sûr la notion anglo-saxonne de « Fake news », mais celle de « fausses nouvelles » ou « fausses informations ». On pourrait hésiter devant cette traduction : l’anglais fake ne peut pas être rendu uniquement par « faux » car il désigne tout autant la contrefaçon que, plus généralement, ce qui présente les apparences d’une chose sans en posséder vraiment les qualités. Mais, au-delà de cet aspect linguistique, la notion recouvre une foule de phénomènes, qui ne peuvent sans doute pas tous être pris en charge par la même loi : informations parodiques prises au sérieux, circulation virale d’informations sans attention au vrai, mise hors-contexte d’images ou de propos ou encore propagande classique trouvant là de nouveaux moyens et de nouveaux canaux… L’hypothèse développée ici est que le débat législatif porte en surface seulement