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Accommodements déraisonnables – à propos de dérives du débat public

Philosophe

On a récemment vu des appels au boycott de certains intellectuels (Gauchet, Heinich…) par d’autres. L’inquiétant dans le climat actuel, c’est que ces accommodements déraisonnables se généralisent, à droite comme à gauche : les règles élémentaires de justice semblent perdre la force de l’évidence au profit du sentiment des uns et des autres de leur propre importance, de leur propre blessure ou de leur propre oppression.

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On joue chez nous depuis bien longtemps à rire des lubies des Nord-Américains (les cafés dilués à l’eau, la manie perverse de l’air conditionné l’hiver ou les présidents oranges). Ces jours-ci, certains sourient donc de cette « culture du campus » qui semble faire passer avant toute chose la protection des groupes dominés par les groupes privilégiés : blancs, mâles, hétérosexuels, cis. Ils moquent l’idée d’ « appropriation culturelle», qui fait d’une jeune femme de l’Iowa en robe chinoise la proie d’une meute de harceleurs en ligne ; on s’amuse des trigger warnings, ces signes qu’un professeur est censé faire à ses étudiants avant d’entamer la lecture d’un texte dont le contenu pourrait offenser les membres d’un groupe discriminé (« attention les vegans : dans ce texte Pascal va parler de chasse et de proie, vous pouvez sortir »). Les vertueuses qui veulent censurer la Belle au bois dormant pour apologie du rapport sexuel non consenti nous font même, avouons-le, franchement marrer.

On riait jusqu’il y a peu ; aujourd’hui d’aucuns s’inquiètent aussi de voir tout cela émerger chez nous, selon une dynamique bien connue qui nous valut le chewing-gum, le coca-cola, les commuters et aujourd’hui les hipsters. Dernièrement fut montée en épingle l’histoire des trois paumés qui, durant l’occupation de leur fac à Rennes, brulèrent un livre de Wolinski au prétexte qu’il promouvrait le patriarcat ; et pour les mêmes raisons politiciennes évidentes, certains se scandalisèrent d’ateliers « non mixtes » pour personnes racisé.e.s.

Il est certes compréhensible de trouver avec une certaine hauteur de vue tout cela pittoresque, et de penser que l’essentiel, la lutte des classes, la domination, les rapports sociaux, l’économie, la redistribution, l’exploitation, la déréliction sociale, n’est pas vraiment affecté par cette agitation. De penser que cela passera, comme la mode du latte à 6 euros avec des dessins dans l’écume, ou celle du gluten-free.

Je tenterai ici une lecture plus sérieuse.

Le psychologue Jonathan Haidt a soutenu qu’il s’agit là d’un conflit entre le vrai et la justice sociale (Haidt au sujet des campus parle de « Social Justice universities and Truth Universities »). Ce qui est juste, c’est de protéger les étudiants venus des minorités opprimées ; de leur offrir, pour reprendre les termes des campus, un « safe space » ; et tant pis s’ils ne sont pas exposés à ce qui usuellement fait la matière même d’un raisonnement orienté vers la vérité, à savoir la pluralité la plus large des opinions possibles. Comme d’autres chercheurs qui soutiennent la liberté d’expression (« free speech ») contre sa restriction à des fins de protection des opprimés, Haidt voit dans le mouvement récent une victoire navrante des Justice Universities.

Cette opposition saisit sans doute un aspect du phénomène. Reste que, en considérant la question au niveau le plus général possible, si le Juste et le Vrai sont bien deux valeurs, il n’y a pas de critère simple et général évident pour favoriser l’un contre l’autre. Confirmer ou rejeter la thèse de Haidt et ses amis requerrait donc une argumentation neuve et complexe de philosophie morale, peut-être impossible. Mais il me semble que l’opposition en question n’épuise pas ce qui se passe avec certaines des manies de la gauche américaine en passe de se répandre chez nous.

Je donnerai quelques autres exemples de prises de position, de discours ou d’événements qui me semblent parfois aller dans le même sens que ces manies ; je dirai ensuite en quoi ce sens consiste. Et j’expliquerai pourquoi, selon moi, il s’agit là d’une direction où il n’est pas raisonnable de tendre, avant de revenir sur l’opposition apparente de la vérité et de la justice sociale.

On se permet donc des petits accommodements avec la démocratie, la rationalité, la justice. Mais n’est ce pas, parfois, la chose à faire ?

Aux Etats Unis, un article du New York Times a récemment critiqué trois des figures iconiques de la Women’s March, laquelle avait rassemblé des millions de femmes contre l’élection de Trump fin 2017. L’une d’elles soutient ouvertement un assassin en fuite à Cuba ; une autre émet régulièrement des tweets antisémites et conspirationnistes.

Hourya Bouteldja, figure de proue du Parti des Indigènes de la République, avait écrit un livre sur lequel il ne s’agit pas de disserter, mais qui inclut des remarques à première vue nettement péjoratives sur les homosexuels. Des signatures de la gauche intellectuelle sont montées au créneau l’an dernier pour dénoncer le lynchage médiatique dont elle est l’objet du fait de ses positions politiques.

Plus récemment, l’avocat Dupont-Moretti s’est fait prendre à partie très violemment après avoir défendu le frère du terroriste Mohammed Merah lors de son procès.

Certains, en France, souhaitent introduire en contexte judiciaire le standard qui, dans les universités américaines, régit le traitement des plaintes pour offense ou agression sexuelles, dite « Title IX ». Selon cette mesure, le critère juridique du « beyond reasonable doubt » qui préside à l’évaluation des témoignages contradictoires lors d’un procès, doit être laissé de côté ; la victime étant dans un état de faiblesse spécifique, le critère usuel avantage l’accusé et l’on devra y remédier en affaiblissant les standards de la recevabilité des preuves de culpabilité, comme le soutiennent certains chercheurs.

On pourrait être surpris de cette énumération : les faits n’ont pas grand chose à voir, dira-t-on, et c’est voulu. Ils concernent des idéologies et des positions politiques très différentes. Toutefois, ils exemplifient tous ce que j’appellerai des accommodements déraisonnables, accommodements avec des principes de base d’équité, de politique, ou de savoir – pour généraliser, de rationalité – auxquels souscrivent pourtant les protagonistes. Comment cela ?

Pour Dupont-Moretti, c’est assez clair. Le droit à un procès équitable et donc à la défense est une base de la démocratie. L’avocat fait son métier, et lui en vouloir de ce que son client soit un sale type (ce qui risque d’arriver assez souvent dans les procès criminels si la police n’est pas trop nulle) est une absurdité.

Vouloir céder sur les standards de la preuve juridique relève exactement de la même confusion. Demander qu’un jugement soit rendu sur la base d’une « intime conviction », ou, en système anglo-saxon (les nuances ici ne comptant pas), « au delà du doute raisonnable », c’est minimiser le risque de condamner un innocent. Evidemment, cela augmente le risque de libérer un coupable, mais l’absence de symétrie entre ces deux choses est une maxime des sociétés démocratiques : mieux vaut dix coupables en liberté qu’un innocent en prison, dit l’adage. Diminuer les seuils de conviction au-delà desquels quelqu’un est jugé coupable revient donc à nier la justice telle qu’elle a été définie en démocratie.

Ainsi, dans les deux cas, quelqu’un ressent que sa cause est assez juste pour pouvoir céder sur des principes démocratiques de base. Mes autres exemples relèvent du même principe : on exonère quelqu’un des horreurs qu’elle dit sur l’homosexualité – horreurs que même des idéologues d’extreme droite n’oseraient pas prononcer – parce que sa cause est bonne ; idem pour les ennemies en chef de Trump, ou pour Ramadan.

On se permet donc des petits accommodements avec la démocratie, la rationalité, la justice. Mais n’est ce pas, parfois, la chose à faire ? Après tout, chacun sait que la violence est certes une mauvaise chose mais qu’il y a des cas extrêmes où elle devient le recours obligé, comme nous l’ont montré tous les films de Bruce Willis.

L’affaire n’est donc pas simple, et elle est importante, aussi vais-je proposer ici un argument détaillé.

Je disais qu’on ne saurait trancher a priori entre la justice et la vérité : de manière générale, lorsque deux valeurs s’opposent, il n’y a pas de critère absolu applicable dans tous les cas pour résoudre l’opposition. Cela est le principe même de la tragédie, qu’elle soit antique, shakespearienne ou classique : pas de règle principielle pour choisir entre la fidélité aux dieux ou les règles des hommes (Antigone), entre l’amour et la patrie (le Cid), entre l’ordre et la justice (pour citer Goethe : « préférer une injustice à un désordre »), entre la vie longue et la gloire (Achille). Chaque individu doit précisément trouver en lui parfois les ressources de trancher. Certes. Et quand ces valeurs différentes sont portées par plusieurs individus, le conflit est rarement a priori décidable.

Dans un livre fondateur de philosophie politique, A Theory of Justice, le philosophe américain John Rawls a bien vu que les hommes souscrivent à des valeurs différentes qui sont peu commensurables. Reste qu’il faut bien organiser la vie ensemble : on ne peut donc pas régler cette vie sociale sur les valeurs (ou des définitions du « bien », comme les appelle Rawls), puisqu’elles séparent les hommes. Ils sont reliés, toutefois, par les principes qui émergent de ce que, vivant tous ensemble, aucun n’a intérêt à être plus défavorisé que les autres par les règles de la société, toutes choses étant égales par ailleurs. Laissant de côté les élaborations abstraites que propose Rawls de cela – et les élaborations politiques proprement rawlsiennes qui vont dans le sens de la justice sociale et s’opposent à l’insistance libérale sur les libertés formelles – , je garde l‘idée que le « juste » définit, indépendamment même des valeurs, ce qui doit s’imposer à tout être raisonnable dès qu’il fait société. Par exemple, cet axiome que la condamnation d’un innocent est la pire des choses en justice (puisque je peux toujours être l’innocent accusé) ; que chacun a droit à une défense et un procès équitable (puisque encore une fois je peux être l’accusé) ; qu’on ne doit pas persécuter les gens pour leurs croyances (même raisonnement ici) ; etc.

Les règles du « juste » pris en ce sens (et non de la Justice sociale comme valeur, dont je parlais auparavant) sont très formelles, très abstraites et simples ; elles n’épuisent pas tout le contenu de la notion de justice, lequel est toujours évidement objet de débat, mais constituent en quelque sorte des contraintes conceptuelles sur toute élaboration de cette notion, des règles qui délimitent le différend raisonnable sur ce qu’il est juste de faire ; et elles découlent directement de la rationalité même.

En ce sens, aucune cause, aucune valeur n’est raisonnablement en droit de céder sur un de ces principes du juste. Or c’est ce qui arrive dans les exemples ci-dessus. Ces accommodements-là avec les principes rationnels élémentaires du juste sont déraisonnables, et condamnables. Il ne s’agit pas ici de prendre parti pour A ou non-A, (pour ou contre un traitement spécial des agressions sexuelles, de Bouteldja ou des plaidoiries de Dupont-Moretti) mais bien des règles qui circonscrivent la possibilité de prendre raisonnablement parti et donc d’être en désaccord éthiquement ou politiquement. Mon propos peut sembler trop abstrait – mais tout différend, pour rester raisonnable, doit justement respecter certaines règles apparemment triviales ou abstraites.

L’inquiétant dans ce qu’on pourrait appeler le climat actuel, c’est que ces accommodements déraisonnables se généralisent, à droite comme à gauche : les règles élémentaires de justice semblent perdre la force de l’évidence au profit du sentiment des uns et des autres de leur propre importance, de leur propre blessure ou de leur propre oppression. Rappelons ici, chose essentielle, que le sentiment d’oppression n’atteste pas forcément de l’oppression : les riches se sentent oppressés par les impôts, les camionneurs par l’écotaxe, les Balkany par la justice, etc.

La liberté d’expression, la critique libre et ouverte sont parmi les conditions du savoir scientifique depuis la Grèce Antique. Nier ce principe revient donc à entrer en contradiction avec sa propre rationalité.

Qu’en est-il, toutefois, de la vérité et de la justice par laquelle j’ai commencé ? Il y a apparemment là un conflit de valeurs, et le passage par la Théorie de la Justice ne nous aide en rien à le résoudre.

On voit en réalité deux sortes d’accommodements déraisonnables. Les premiers se font avec les règles élémentaires du juste – sur le mode de « c’est pas grave puisque c’est pour la bonne cause ».  Comme j’ai montré, ils sont déraisonnables par définition.

Les seconds relèvent davantage du dilemme que pointait Haidt, même si entre les deux la frontière est floue. Ils adviennent par exemple lorsque des intellectuels pour la bonne cause oublient les principes qui les soutiennent dans leur propre activité d’intellectuels (qui ne sont pas forcément les principes très généraux circonscrivant le « juste », même s’il peut y avoir recouvrement).

En voici une illustration.

La littérature sur les différences possiblement biologiques entre les genres est un champ de mines. Bien entendu, les discours idéologiques pullulent. A droite, on veut montrer que les hommes doivent naturellement commander et gagner de l’argent, les femmes pondre et tricoter – incapables de lire une carte, il vaut mieux pour elles qu’elles ne quittent pas la grotte où elles sont nées ; on prend la belette ou le casoar pour modèle dans la nature (avec le lion, déjà, ça ne marche plus trop). A gauche, on est spontanément et radicalement social-constructiviste : si on devient femme par la société, c’est qu’on naît ni femme ni homme.

Objectivement parlant, comme tout, c’est compliqué. Le sexe étant déjà assez complexe chez les arthropodes et les cnidaires, on peut s’attendre à ce que chez les humains il le soit davantage.

Mais la manière dont les uns et les autres traitent la biologie de la chose oublie cette complexité. L’idéologue de droite étant au fond passablement ridicule (le crapaud buffle et le paon le réfutent), l’idéologue de gauche m’intéresse davantage. Lorsqu’il est intelligent il va scruter les recherches portant sur la biologie des genres, en particulier celles de la cognition et des affects. Avec raison, il va débusquer les effets d’une antique idéologie sexiste, présente dans les théories de l’orgasme féminin ou de l’origine du clitoris (Lisa Lloyd), de la sélection sexuelle (Joan Roughgarden), de l’agression (Helen Longino). Mais il va aussi pointer de la manière la plus zélée possible les effets d’échantillons quand il y en a, ou les sauts un peu trop faciles de la corrélation à la causalité. Le récent livre de Cordelia Fine, Testosterone Rex, couronné par la Royal Academy britannique, illustre bien cette attitude, l’auteur allant traquer les petites incohérences, les hésitations, les incertitudes dans l’étude de la différence de la distribution de testostérone entre les hommes et les femmes lors du développement (la testostérone étant supposée être l’hormone masculinisante).

Prise dans son ensemble naïvement la biologie semble nous dire que les différences entre les hommes et les femmes sur certains aspects de la cognition sont rares et peu prononcées ; et qu’elles sont très généralement inférieures aux différences interindividuelles. Cela suffit, en fait, à rejeter la croyance en une différence radicale entre tous les hommes et toutes les femmes. Mais les contempteurs de l’ensemble de la biologie des différences de genre posent problème de par leur attitude critique radicale. C’est ce que certains biologistes ont ainsi reproché à Fine : évaluer différemment les études au résultat positif et au résultat négatif sur les différences biologiques intergenre, en surévaluant des études minoritaires et en en dévaluant d’autres. En effet, prenons par comparaison la science du réchauffement climatique : bien sûr il y a des « rapports minoritaires », pour utiliser la jolie expression de Philip K. Dick, bien sûr il y a des divergences d’experts, mais il n’est pas illégitime pour le grand public de condenser tout notre savoir, par la formule « le climat change drastiquement à cause des activités humaines ». Notre pourfendeur de l’hétéronormativité généralement accepte généralement le consensus scientifique sur le réchauffement climatique ; mais s’il usait des mêmes critères pour lire la littérature biologique qu’il critique, une bonne partie de ses objections s’effondreraient. Autrement dit, dans ce cas précis, le chercheur, au nom de la bonne cause (l’égalité des genres) va appliquer deux critères différents pour lire la science – et donc déroger à ses règles rationnelles d’examen de la littérature scientifique.

Certes, on pourrait soutenir que les seuils de signifiance statistique – au nom desquels on dit que l’on a prouvé l’effet causal de X sur Y, ou l’existence d’une différence entre la classe A et la classe B de phénomènes – que ces seuils ne doivent pas être définis abstraction faite de la société et de la politique humaines. Ainsi, certains, comme l’historienne des sciences Naomi Oreskes, soutiennent que dans le cas du changement climatique on doit les baisser, car le coût d’un faux négatif (croire que la température ne monte pas alors qu’elle monte, et donc s’abstenir de prendre les mesures nécessaires) est bien supérieur à celui d’un faux positif (croire que la température monte alors qu’elle ne monte pas). Peut-être dans d’autres cas, comme la biologie des genres, devrait-on penser ainsi : mais il faut avant toute chose le montrer, et non agir comme si c’était une évidence, parce qu’a priori il est rationnel de poser les mêmes seuils de signifiance dans tous les domaines.

On retrouve alors ces petits arrangements avec les principes épistémiques de base lorsque des intellectuels appellent ouvertement à la censure ou au retrait d’articles. La liberté d’expression, la critique libre et ouverte sont parmi les conditions du savoir scientifique depuis la Grèce Antique ; cette ouverture régit la communication scientifique, du moins en principe. Nier ce principe revient donc à entrer en contradiction avec sa propre rationalité.

On a récemment vu de tels accommodements lorsque des philosophes américains menèrent campagne contre l’un d’eux, coupable d’avoir publié dans la revue de philosophie féministe Hypatia un parallèle entre transgenre et transraces (affaire Rebecca Tuvel), ou lorsqu’en France on prit à parti des savants du fait de leur position politique (boycott de Marcel Gauchet au Rendez-Vous de l’Histoire de Blois, ou plus récemment la sociologue Natalie Heinich, auteur justement d’un livre sur les valeurs qui reçut un prix que certains souhaitaient lui voir retirer). Ils sont donc en eux-mêmes déraisonnables.

Mais ils le sont d’autant plus qu’ils ont aussi pour conséquence de laisser le champ libre à des idéologues qui feront passer leur camelote pour de la vraie science.

En effet, si l’on rejette a priori des arguments ou des découvertes sur la différence biologique entre les genres, au motif que toute différence est socialement construite, on accrédite chez ceux qui ne sont pas du même bord l’idée que la biologie des genres est ce qu’en disent les adeptes de la thèse « naturellement différents mais complémentaires ». Or la biologie ne dit justement rien de tel, elle explore simplement un champ extrêmement complexe de différences, de similarités, d’interactions entre processus évolutionnaires qui deviennent dans le cas des humains des interactions entre évolutions génétique et culturelle. Elle ne prescrit rien du tout, mais si elle devait le faire ses prescriptions seraient simplement illisibles.

Autrement dit, ces accommodements-ci sont déraisonnables non seulement parce que celui qui les pratique déroge à ses propres principes épistémiques, et éventuellement – s’il en vient à vouloir restreindre la liberté d’expression – à des règle minimales de justice en démocratie ; mais aussi du fait qu’à moyen terme ils laissent un boulevard à ceux qui voudront faire passer pour la vérité, la science ou le savoir, des préjugés sexistes, racistes ou autres, dont la science avait justement démontré l’inanité.


Philippe Huneman

Philosophe, Directeur de recherche à l’IHPST (CNRS/Paris-I)

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