Bioéthique

Reconnaître les familles issues de don : un défi social et bioéthique

Sociologue

La radicalisation des conservateurs extrémistes de La Manif pour tous et de leurs alliés a eu pour effet de reculer à plusieurs reprises le vote d’une loi visant à rendre égalitaire l’accès à la PMA. Toutefois, les états généraux de la bioéthique qui se sont déroulés en 2018 n’ont pas donné raison à cette minorité bruyante : de très nombreux organismes ont rendu un avis favorable à une telle loi. Il est désormais temps d’entrer dans les détails de la rédaction d’un texte, et avant cela d’échanger au sein d’un cadre intellectuel souple rassemblant juristes, sociologues, anthropologues, médecins, acteurs associatifs, élus et personnes concernées pour faire le point sur les enjeux bioéthiques des familles issues du don.

Le samedi 30 mars aura lieu, à l’initiative de deux centres de recherche de l’EHESS et de l’Université Paris 1, un colloque un peu particulier, conçu comme un moment privilégié de « dialogue entre droit, sciences sociales, action associative et responsabilité politique » autour de l’une des questions majeures soulevées par la prochaine réforme des lois de bioéthique : l’engendrement avec tiers donneur. Six associations de personnes concernées et quatre grands témoins ont été invités à débattre avec les chercheurs et universitaires. Le Défenseur des droits ouvrira l’une des sessions.

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Qu’est-ce que l’engendrement avec tiers donneur ? La catégorie vise à s’émanciper du seul point de vue médical pour faire valoir un point de vue sociologique et anthropologique plus large, donnant à voir non plus principalement ce que font les médecins et biologistes – pratiquer une technique –, mais bien plutôt ce que font les personnes qui mettent au monde un enfant avec l’aide de la médecine. Elle permet de rassembler tous les cas où un couple – ou une personne seule – engendre un enfant grâce à une tierce personne qui a donné de sa capacité procréatrice non pour devenir parent, mais pour permettre à d’autres de le devenir. Le don de sperme, d’ovocyte ou d’embryon (permis en France) ainsi que le don de gestation (interdit en France), sont les quatre formes que peut prendre aujourd’hui cette coopération entre ceux qu’on nomme les « parents d’intention » parce qu’ils sont les auteurs du projet parental,  et celles et ceux qui les aident, par leur don, à pouvoir fonder une famille.

Ce colloque intervient à un moment précis : l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, qui aurait pu être inscrite dans la loi de 2013 qui a ouvert le mariage et la filiation aux personnes de même sexe, puis qui avait été annoncée pour une future « loi famille » (qui n’a jamais vu le jour), va trouver son aboutissement dans la prochaine rénovation des lois de bioéthique.  Des états généraux ont été


Irène Théry

Sociologue, Directrice d'études à l'EHESS

Mots-clés

Féminisme