Pourquoi avons-nous si peur des fake news ?
Internet et les réseaux sociaux ont tout déréglé. Robots, agents russes, algorithmes, groupuscules de l’ultra-droite et toutes sortes d’officines à visée idéologique ou commerciale ont profité de l’infrastructure ouverte du réseau pour propager des infox. Un véritable bombardement de messages douteux, de photos truquées ou antidatées, de rumeurs scabreuses, d’informations décontextualisées ou honteusement fausses, d’insinuations conspirationnistes et de messages sculptés pour désorienter les convictions de profils ciblés s’est abattu sur le web.

Un grand processus de dérégulation du marché informationnel a été ouvert par le numérique. Il serait responsable du Brexit, des élections de Donald Trump et de Jair Bolsonaro ou de la radicalité des Gilets Jaunes. Les gens ont mal voté parce qu’ils ont été manipulés par des acteurs mal intentionnés qui ont su exploiter les aspects les plus toxiques de l’infrastructure du réseau. La question fait si peu de doute qu’un déterminisme technologique un peu trivial sert désormais de clé d’explication à la montée des populismes, à la crise des médias et à la diffusion de croyances irrationnelles. Internet est le problème et si l’on pouvait nettoyer le web des infox, nous en aurions fini avec les mauvais votes, la méfiance et la crédulité.
Cette panique autour des fake news souligne un enjeu important qui mérite toute notre attention, mais il n’est pas sûr que le diagnostic soit très bien établi. Dans ce tintamarre de propos assurés souvent fondés sur des raccourcis et des anecdotes personnelles (« alors ma cousine a été maraboutée sur Twitter… »), il est frappant de constater à quel point les chercheurs travaillant sur ces questions ne sont guère entendus. Il est vrai que les études numériques sont parfois difficiles à comprendre et que leurs méthodologies doivent être soigneusement inspectées. Il arrive d’ailleurs que des recherches en computational social science viennent apporter de l’eau au moulin de la panique en produisant d