Savoirs

De Verdun à Vichy et retour : quand des économistes font fausse route

Historienne, Historien, Chercheuse en sciences sociales, Historien, Historien

Les simplifications, voire les inexactitudes, à propos des guerres mondiales sont monnaie courante dans l’espace public. Et il appartient aux historiens de les corriger, comme le font ici plusieurs auteurs dans un texte en réponse à « De Verdun à Vichy » publié récemment dans AOC. Ils rappellent ainsi les règles de méthode présidant à toute démarche de connaissance, tout en pointant un travers actuel de la recherche en sciences sociales : la passion parfois aveugle pour le Big Data et le traitement sériel de données.

Pour qui fait l’histoire des guerres mondiales, lutter contre les simplifications répandues dans l’espace public fait presque partie du quotidien. Il se passe rarement un mois sans qu’une controverse médiatique ou mémorielle n’implique, en son centre ou à la marge, Vichy ou la collaboration, les « poilus » ou les résistants, Churchill ou Pétain. Il est plus rare, toutefois, de devoir prendre position lorsque les contresens et les simplismes concernant ces périodes ne proviennent pas de polémistes assumant leur ignorance, mais d’universitaires de premier plan, comme les économistes signataires du texte paru récemment dans AOC.

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Version abrégée d’un travail de recherche primé, cet article présente pourtant une quantité tellement étonnante d’erreurs de méthode, de perspective et de fond, pour tout dire d’histoire, qu’il paraît nécessaire de les examiner, y compris dans les points techniques mobilisés dans ses raisonnements, afin de réfuter la vision faussée de la période et du fonctionnement social qu’il propose. Pas pour suggérer un triste partage des rôles où les spécialistes d’histoire défendraient leur chasse gardée sur le passé, bien sûr, mais plutôt pour rappeler des règles élémentaires présidant à toute démarche de connaissance, quelle qu’en soit la discipline, et ainsi regretter que nos éminentes collègues n’aient semble-t-il pas envisagé la voie du travail interdisciplinaire pour répondre à des questionnements qui sont, c’est certain, importants[1].

En fait de révélations sur Vichy, une méconnaissance profonde

Le texte cosigné par Julia Cagé, Anna Dagorret, Pauline Grosjean et Saumitra Jha a pour ambition d’éclairer rien moins qu’un pan central de l’histoire de France : le lien entre l’expérience de la Grande Guerre et l’adhésion au régime de Vichy, dont Pétain serait la clé.

Il est dès lors surprenant d’y lire tant d’erreurs factuelles, qu’une consultation minimale des abondants travaux sur la période ou même de simples manuels aurait permis d’éviter. Le paragraphe introductif de l’article évoque ainsi pour le 6 février 1934 « des émeutes devant la Chambre des députés » (les violences ont lieu rive droite, au pont de la Concorde), parce que des « milliers de partisans de la droite défilent alors contre la République et contre la gauche, amalgamée avec le communisme » (en réalité, l’ARAC, association communiste d’anciens combattants, défile également ce jour-là).

On lit ensuite que Pétain est « élu à la tête d’un pouvoir autoritaire » : mais Pétain n’a jamais été élu, devenant président du Conseil de la Troisième république à la place de Paul Reynaud, alors qu’il siégeait déjà au gouvernement, le 16 juin 1940. Comme pour Hitler, parler d’une « élection » pour Pétain relève d’un grave contresens sur la période et les dynamiques politiques qui ont permis la mise en place de leurs régimes. Contresens aggravé par l’idée d’une arrivée au pouvoir « après [la] cuisante défaite » de la France » alors que la défaite n’est actée que par un choix de Pétain, déjà au pouvoir, qui privilégie l’armistice envisagé à partir de son message radiodiffusé du 17 juin 1940 à la poursuite de la guerre dans l’empire. Comment ne pas relever non plus l’idée fausse d’un « caractère répressif » de Vichy « qui s’accentue » en novembre 1942, comme si les massives rafles de l’été 1942 n’avaient pas eu lieu, pas plus que l’internement qui jette plus de 40 000 personnes supplémentaires dans les camps de la zone libre dès la fin de 1940 ?

On reviendra plus loin sur les problèmes posés par la catégorie des « collaborateurs » telle que l’emploient les auteures, mais on peut déjà indiquer qu’il est faux d’assimiler ceux-ci aux « plus fervents partisans des nazis », nombre d’acteurs et de soutiens de l’État français, de Weygand à Maurras ou Giraud, restant résolument hostiles à l’Allemagne. L’expression « milices paramilitaires de Vichy » n’a quant à elle aucun sens, mêlant la Milice française (qui dépend de Vichy) et les mouvements pro-nazis basés à Paris, opposés à Vichy, comme le Parti populaire français. Il est également faux d’écrire que c’est après le 24 octobre 1940 et le choix de la collaboration à Montoire que « le régime épouse alors rapidement un programme d’extrême droite raciste », puisque le statut discriminatoire contre les juifs date d’avant cet épisode, le 3 octobre 1940, et que la xénophobie s’exprime par des mesures de dénaturalisation initiées dès juillet 1940.

Pour ce qui relève de la Grande Guerre, le constat est identique et les approximations multiples. Verdun, bataille assez importante en elle-même pour ne pas être bizarrement qualifiée de « “Stalingrad” de la première guerre mondiale », a tué environ 160 000 soldats français, le chiffre de « 305 440 soldats » qui est avancé dans l’article englobant les morts allemands, et donnant l’illusion de la précision à l’individu près. Pétain, devenu général d’armée en juin 1915, n’est pas un inconnu nommé « du seul fait de sa disponibilité » en février 1916. Les hommes affectés à Verdun entre le 25 février et le 1er mai 1916 ne sont pas sous son « commandement direct » : cette notion renvoie bien davantage aux colonels à la tête de chaque régiment, puis aux officiers de troupe, capitaines et lieutenants, qu’au lointain état-major. Sa réputation de « héros de Verdun » est à nuancer dans l’immédiat, puisqu’il ne commande le secteur qu’un peu plus de deux mois, et que ce sont les généraux Nivelle et Mangin qui récoltent une large part de gloire militaire par les gains obtenus sous leur commandement entre mai et décembre 1916. Enfin, faut-il rappeler que pour les soldats, avoir combattu à Verdun n’implique en rien d’être « prêts à renoncer à leur propre bien-être » ? Conscrits, mobilisés, ils n’eurent pas le choix d’y renoncer ou non.

Une erreur basique qui invalide l’ensemble des raisonnements

Même si chacune de ces erreurs, prise séparément, constitue un indice inquiétant d’ignorance des périodes examinées, et que leur réunion indique une désinvolture stupéfiante dans son approche, une lecture rapide pourrait laisser penser à des raccourcis ou maladresses d’expression, ne venant pas fragiliser un raisonnement solide en son cœur. Il n’en est pourtant rien. La totalité du travail, qu’il s’agisse du texte en français publié dans AOC ou du long et riche article en anglais dont il donne la synthèse, repose sur une erreur initiale et dirimante. Il faut en exposer les composantes, pour techniques qu’elles puissent sembler.

Les auteures entendent mesurer le lien statistique entre le fait d’avoir « servi à Verdun sous Pétain » et « la proportion de Collaborateurs », avec une surreprésentation de ces derniers là où prévaudrait cette expérience. Une telle opération, même en laissant de côté les problèmes logiques et historiques qu’elle pose en termes de causalité, suppose donc d’identifier avec précision qui a « servi à Verdun sous Pétain » : elles se fondent pour cela sur les « municipalités peuplées de soldats ayant servi à Verdun sous Pétain ». La version anglaise et détaillée du texte précise leur façon de procéder : elles se fondent sur le bureau de recrutement des 144 régiments d’infanterie de 1914, situés selon elle dans une « sous-région spécifique ». Une commune, un régiment : l’affaire semble simple, même si la saisie doit être fastidieuse, et permet donc de savoir qui a « servi à Verdun » d’après son lieu de naissance.

Mais les régiments d’infanterie de la Grande Guerre ne fonctionnent pas ainsi, ni en 1914, ni à plus forte raison en 1916. Lorsque la guerre éclate, les régiments ne sont plus strictement recrutés sur une base locale ou départementale. La mutinerie du 17e régiment d’infanterie de Béziers, en 1907, a contribué à persuader les autorités qu’il fallait diluer les unités pour briser de possibles solidarités contestataires. Lisons comment est composé le 151e régiment d’infanterie, quand s’ouvrent les hostilités :

« À peu près un quart [des recrues] venaient des départements de la Meuse et de la Meurthe-et-Moselle en Lorraine et un autre quart du Nord et du Pas-de-Calais en France du nord. D’autres gros contingents de troupes venaient des départements de la Somme et de l’Aisne en Picardie, avec les 18e, 19e et 20e arrondissements de Paris[2]. »

Un régiment : au moins sept départements. Le lien direct entre régiment et municipalité postulé dans l’article de Julia Cagé, Anna Dagorret, Pauline Grosjean et Saumitra Jha, et sur lequel se fonde l’ensemble de leur raisonnement, n’existe pas. Leurs calculs reposent sur un artefact.

En 1916, les choses ont encore profondément changé. Il n’y a plus 144 régiments d’infanterie comme en 1914, mais plus de trois cents, du fait de l’appel aux régiments de réserve (qui doublent dès la mobilisation le nombre des unités) et des besoins en effectifs – ce que les auteures ne prennent pas en compte dans leurs calculs, comme si l’événement guerrier n’avait rien changé. Surtout, chacun de ces régiments est désormais composé de soldats de tous les horizons géographiques : si certains gardent entre un tiers ou la moitié de combattants issus de la région de recrutement initiale – non limitée comme le pensent les auteures à des bureaux de recrutement uniques qui se laisseraient aisément cartographier, afin d’être ensuite superposés à la « proportion des collaborateurs » – la plupart ont reçu des renforts de provenance variée.

C’est ce qu’explique Jules Maurin dans son grand travail de sociographie de l’armée française à partir de deux bureaux de recrutements, qui consacre un chapitre entier à ce « brassage des troupes[3] ». C’est ce que confirment des monographies : pour le 117e régiment d’infanterie, l’état des lieux dressé en 1916 par le colonel qui le dirige indique 2 831 militaires, dont seuls 1 197 sont originaires du bassin élargi de recrutement officiel du régiment, les départements de la Sarthe, de la Mayenne, et une partie de la Bretagne. Les autres ont été ajoutés en provenance (au moins) de la Vienne, Saône, Seine et du Jura[4]. Au 47e régiment d’infanterie, courant 1915, les renforts reçus ajoutent à cette unité d’ancrage breton des soldats provenant du Limousin, du Languedoc, de Franche-Comté et de Champagne[5].

On pourrait multiplier les exemples : la corrélation géographique sur laquelle les auteures fondent la totalité de leur raisonnement n’existe pas. Et ce d’autant moins que leurs calculs et leurs cartes incluent le Nord, le Pas-de-Calais, les Ardennes : des départements sous occupation allemande pendant toute la guerre, donc lors de la bataille de Verdun en 1916 ! Les régiments qui pouvaient en être initialement originaires sont à cette période composés de recrues de l’ensemble du territoire.

Ainsi, une carte des soldats ayant réellement « servi à Verdun sous Pétain » ne montrerait pas, comme celle des auteures, certains départements ou certaines zones à l’exclusion des autres (le Calvados mais pas la Manche, la Dordogne mais pas la Gironde, etc.), mais l’intégralité du territoire, avec de très légères variations d’intensité. Reconstituer précisément qui a « servi à Verdun sous Pétain » serait possible – pour autant que cela puisse avoir le moindre sens d’isoler une période de deux mois au sein de la trajectoire militaire d’individus trop âgés en 1940-1944 pour former les gros bataillons des organisations et partis de la Collaboration – mais au prix d’un travail de recueil des données individuelles, sur un échantillon de soldats, à partir de leurs fiches matricules. Un travail bien différent de l’application d’une équivalence directe entre municipalité et régiment, qui fausse l’article ici discuté.

Repérer ces erreurs, qui rendent erronés l’ensemble de leurs résultats, conduit à s’interroger sur la conception de la recherche qui les anime, puisqu’un simple message adressé à un historien ou une historienne connaissant ces questions, pour avis ou relecture, aurait suffi à les éclairer. Imagine-t-on des économistes écrivant un article d’astrophysique ou de médecine sans le faire a minima relire par des experts du champ ? Pointer ce manque ne suffit toutefois pas à épuiser les problèmes posés par leur texte quant au traitement des sources, des données, des catégories et de la causalité.

Illusion scientiste et mépris des sources

Faussée dès l’origine par cette méconnaissance des réalités de 1914-1918, la démarche économétrique des auteures l’est également à l’autre extrémité du raisonnement, celle qui concerne la « proportion des collaborateurs ». Le problème, au fond, est le même, qui consiste à utiliser des données numériques brutes ou agrégées, afin de calculer des corrélations, sans s’interroger sur leur provenance. Il s’agit même, au-delà du texte ici discuté, d’un travers grandissant qui affecte les sciences sociales ainsi que l’expertise ou le journalisme, autant de champs du savoir pris de passion pour le Big Data, dans l’illusion d’un accès à des réalités par le traitement sériel de données. Mais pour qu’une donnée soit exploitable, et à plus forte raison mobilisable dans de complexes calculs, encore faut-il savoir comment elle a été constituée et construite. Lorsqu’il s’agit de documents ou de traces du passé, cela porte un nom très simple : la critique des sources.

Soit une « liste de collaborateurs » établie en 1944 ou 1945 : un document du passé, dont on ne sait presque rien[6]. Une série de noms : 96 492 personnes, d’après l’ouvrage s’en étant fait l’écho, 95 943 d’après les auteures, 90 273 pour celles dont elles ont géolocalisé l’origine géographique (sans d’ailleurs que le sens de cette opération ne soit jamais indiqué : un ancrage géographique, au moment de la « collaboration », à la Libération ou encore avant le début de la guerre ?). Et c’est cette localisation supposée, en lecture directe, qui leur permet de calculer des corrélations avec le supposé passé guerrier des municipalités.

Arrêtons-nous un instant sur l’audace d’une telle entreprise : il ne s’agit pas de personnes condamnées ni jugées pour faits de collaboration, ni d’un relevé systématique de celles faisant partie des organisations proches de Vichy ou des Allemands, mais d’une liste dont rien ne dit qu’elle puisse revêtir le moindre caractère d’authenticité, d’exhaustivité, ou de représentativité sociale, politique ou géographique. Une liste qui est donc utilisée pour « calculer » une présence supposément plus forte des « collaborateurs » dans certaines localités, mais qui pourrait très bien surreprésenter une ville ou une région entière, pour peu que les auteurs – inconnus – de ce document aient reçu davantage de dénonciations, ou mis la main sur un fichier nominatif local, par exemple. Les auteurs de la liste eux-mêmes, dans leur avant-propos des années 1940, indiquaient : « le présent document a pour but de signaler le nom des individus suspects ou douteux qui doivent faire l’objet d’une enquête approfondie[7]. » Il ne s’agit donc même pas de collaboration avérée, mais de faits non encore étayés au moment où cette liste est produite, dans des conditions qui nous échappent (par qui ? à partir de quoi ? avec quels objectifs ?).

Son utilisation à des fins de calculs ou de comparaison statistique est donc un nouvel artefact : comme si des spécialistes de la RDA se fondaient sans précaution sur les fichiers de personnes surveillées par les services de sécurité pour cartographier l’opposition au régime, comme si on calculait des taux de survie des Juifs à partir des dossiers de Justes, produits de manière fluctuante depuis 1963 du fait des témoignages de personnes sauvées, ou encore comme si les spécialistes de relations internationales utilisaient la liste annuelle des 100 personnalités les plus influentes établie par le magazine Time pour quantifier les rapports de force mondiaux.

On se convaincra d’ailleurs aisément de l’absence de fidélité de ce document aux profils de la collaboration en observant les chiffres des différentes organisations qui y sont indiqués. Sans même se plonger dans les différentes archives ayant trait à ces questions, des travaux aisément consultables auraient ainsi permis aux auteures de disposer de quelques ordres de grandeur permettant de relativiser la valeur de ce « fichier[8] ».

Ainsi le Service d’ordre légionnaire (SOL) n’est crédité dans cette liste que de 1 741 membres, tandis que la Milice, organisation qui lui succède, est quant à elle créditée de 15 404 membres, soit des chiffres sans rapport avec la réalité : ceux du SOL furent dix fois plus importants, tandis que la Milice eut entre 25 000 et 30 000 adhérents, dont l’immense majorité n’a d’ailleurs pas servi durant la Première Guerre mondiale. Le groupe Collaboration quant à lui compta jusqu’à vingt-cinq fois plus de membres que ce qui est indiqué : près de 40 000 personnes, par rapport aux 1 493 mentionnées. Enfin, le plus important parti de l’ultra-collaboration fut le Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot, de 40 000 à 50 000 adhérents, loin devant le Rassemblement national populaire de Déat (RNP)[9]. Une situation inversée dans le document servant de base aux calculs des auteures : c’est le RNP qui semble dominer avec 17 745 personnes contre 9 194 pour le PPF, en faisant ainsi le principal mouvement de la Collaboration, loin de la réalité historique.

Aucune de ces proportions n’est un tant soit peu respectée dans ce fichier qu’il est dès lors impossible de considérer comme un échantillon représentatif, et donc fiable, des collaborateurs. Ici encore, imagine-t-on des économistes calculer une masse salariale ou un taux d’inflation en utilisant des données chiffrées non sourcées, variant du simple au double ou au triple par rapport aux réalités ?

On voit ainsi que les présupposés scientistes, en apparence, de l’enquête, contredisent en réalité les principes mêmes qui font de l’histoire une science sociale, et qui tiennent au statut des sources et aux modalités de leur examen. Utiliser en lecture directe des documents sans s’interroger sur leur statut et leur condition de production, comme support de raisonnements et de calculs complexes et prétendument probants : nous voilà d’une certaine façon revenus sept ou cinq siècles en arrière, avant que Lorenzo Valla puis Jean Mabillon ne posent et systématisent les éléments de la critique des sources.

Une vision mécaniste des dynamiques politiques et sociales

Mais en dehors de cette invalidation, c’est la vision du monde social présente en filigrane de ce texte qu’il faut questionner, ainsi que les catégories de pensée qu’il mobilise. On ne peut que s’étonner, d’abord, de voir dans le titre de l’article ainsi que dans son développement l’utilisation des mots « traîtres » et « héros », qui relèvent du jugement moral et non de l’analyse historique. Le premier de ces termes entend subsumer pour les auteures les collaborateurs, mais la Collaboration n’est pas définie, sinon d’une manière vague. On l’a vu, l’insatisfaisant « fichier » utilisé rassemble une majorité de membres supposés de groupements politiques ainsi que des acteurs économiques. Mais quel rapport entre les adhérents de tel mouvement ou parti prônant l’ordre nouveau, signifiant une adhésion idéologique, et des personnes relevant de ce qui fut appelé la « collaboration économique », suivant d’autres logiques ? Dès lors, ni les membres du commissariat général aux Questions juives, ni les administrateurs provisoires en charge de la liquidation des biens appartenant aux Juifs, ni les délateurs ne sont envisagés alors qu’ils pourraient relever d’une catégorisation de « collaboration » aussi vague ou élastique que celle que présente la source utilisée.

En amont, du côté des anciens combattants et de leur rôle supposé, « l’héroïsme » est tout aussi problématique. L’approche retenue consiste en effet à englober la totalité des combattants (supposés) de Verdun dans un même ensemble, ce qui exclut les appréciations élogieuses portées ici et là dans le texte : « des héros décorés qui ont beaucoup donné au service de leur pays », « certains des plus grands héros de la France ». En suivant le raisonnement des auteures elles-mêmes, tout soldat présent dans un régiment à Verdun dans la période correspondant au commandement de Pétain est censé entrer dans leur corpus, même sans décoration ni citation à l’ordre du jour, même s’il a déserté au cours de la bataille ou ne s’y est aucunement distingué, subissant passivement les événements – expérience majoritaire à l’époque. Dès lors, la catégorie « héros de Verdun » est elle aussi un artefact.

Elle l’est d’autant plus qu’on ne voit pas pourquoi seuls ces individus auraient, à leur retour, été « reconnus pour leurs actes de bravoure » dans leurs communes d’origine : pourquoi ceux de Verdun et pas de la Marne ? de la Somme ? du Chemin des Dames ? de Gallipoli ? etc. L’idée d’un capital héroïque associée à la Grande Guerre pourrait être stimulante, si elle était travaillée à partir de sources, et non postulée a priori, et si elle était articulée à une compréhension réaliste de l’inscription sociale des combattants et anciens combattants.

La démonstration d’ensemble repose, en effet, sur l’hypothèse qu’un soldat s’identifierait au chef sous les ordres duquel il a combattu, ce qui démontre une conception particulièrement rigide des rapports sociaux. Ce que signifie concrètement être « exposé » à ce chef reste pourtant très flou : Pétain ne passait pas ses journées à rendre visite aux soldats. Il est vrai que les auteures ajoutent une condition : celle que la bataille soit assez connue – en effet, avoir servi sous Pétain ailleurs qu’à Verdun n’aurait aucun effet. Il est pourtant peu probable que les hommes qui ont servi à Verdun aient été capables, comme le font a posteriori les auteures, de découper leurs états de service en fonction des changements dans l’état-major.

D’une façon plus générale, l’influence du maréchal Pétain sur les choix politiques des anciens combattants dans l’entre-deux-guerres est plus que douteuse. Faute d’arguments solides, les auteures semblent prouver tout et son contraire. Ainsi, Pétain n’avait pas de positionnement politique explicite avant 1936, mais n’en influençait pas moins les choix des électeurs dès 1924. Des choix de droite bien sûr, marqués notamment par l’anticommunisme : et pourtant, Pétain était révéré par la gauche… Difficile de se retrouver dans un ensemble aussi contradictoire.

Surtout, tout en prétendant démontrer l’existence d’un « réseau » héroïque, fondé sur une « identité de groupe commune », les auteures ne prouvent pas son existence et ne cherchent même pas à s’intéresser concrètement aux organisations qui réunissent les combattants, dont une thèse fondamentale a montré voici plus de quatre décennies qu’elles avaient leurs logiques politiques propres, loin du soutien univoque à l’armée, à un camp politique ou à une seule personnalité[10]. En supposant qu’un réseau, même informel, d’anciens « Verdun sous Pétain » ait existé, on voit mal comment ces sociabilités auraient échappé aux organisations combattantes de l’entre-deux-guerres ou, sous le régime de Vichy, à la Légion française des combattants, qui regroupait près de la moitié des anciens combattants en zone sud[11].

Rien dans l’histoire de ces organisations ne montre pourtant une distinction entre les soldats ayant fait Verdun ou les autres. Parmi les nombreuses associations de l’entre-deux-guerres, il y avait certes des amicales « Ceux de Verdun », mais leurs effectifs étaient incomparablement moins importants que ceux des associations généralistes, sectorielles ou destinées aux invalides. Quant à la Légion, elle ne faisait pas particulièrement allusion à Verdun dans sa propagande, et elle proscrivait – sans moyens de contrôle il est vrai – l’adhésion à un certain nombre des groupements « collaborateurs » retenus dans l’article[12].

Sans trace de ce « réseau héroïque » dans les organisations qui rassemblent la plus grande partie des anciens combattants, il ne reste plus alors que deux points d’« ancrage » supposés. Le maréchal Pétain lui-même, qui dans son premier discours de juin 1940 – placé en exergue de l’article de recherche – se déclare « sûr de l’appui des anciens combattants qu’(il) a eu la fierté de commander » ; et Joseph Darnand, qui prétend expliquer en 1944 la dérive des miliciens par la fidélité « à un grand soldat ». Les déclarations propagandistes et narcissiques du maréchal Pétain ne sauraient pourtant être prises pour des vérités historiques. Quant à Darnand, son expérience de guerre est bien peu représentative de celle des anciens combattants, de même que ses engagements dans l’entre-deux-guerres[13]. Quand un activiste d’extrême-droite prétend justifier son action par des motifs politiques nobles, les chercheurs seraient bien avisés de faire preuve d’esprit critique.

Ces éléments suffisent, enfin, à mettre en lumière un impensé théorique, et en réalité anthropologique, du travail dont il est question : les auteurs y présupposent un lien naturel entre comportements sociaux et convictions politiques. Or de nombreux auteurs ont montré, par exemple, qu’il n’était pas nécessaire en 1914 « d’être motivé pour tuer » ou en entre 1941 et 1944 d’être antisémite pour mettre en œuvre une politique administrative qui pourtant discrimine les Juifs, d’avoir décidé d’abdiquer ses pouvoirs pour le faire effectivement pour les députés en 1940 comme pour ceux de 1789, ou encore d’haïr (ou d’aimer) les Tutsis ou les Juifs pour décider de les exterminer (ou de leur prêter secours)[14]. Les travaux sur les motivations invitent à relativiser l’hypothèse même de corrélation que les auteures du texte considéré souhaitaient démontrer à partir de données artificielles.

Une hypothèse dont il faut relever, pour finir, combien elle reste désespérément monocausale : comme si, dans tout le parcours de certains hommes ayant survécu à la Grande Guerre, et connu la « victoire endeuillée », les grèves de 1919, les espoirs de la SDN, la crise des années 1930, la montée aux extrêmes politiques, le Front populaire et sa chute, Munich et la « drôle de guerre », la défaite et parfois l’exode, seules ces quelques semaines à Verdun avaient compté, et contenaient déjà en germe toute leur évolution sociale et politique, expliquant non seulement leurs choix mais aussi ceux de leurs voisins sous l’Occupation.

En guise de conclusion : un texte symptomatique de conceptions dommageables pour la recherche en sciences sociales

On a montré quelles insuffisances de forme, de méthode et de fond marquaient le texte ici critiqué. Si on a tenu à le faire longuement, ce n’est certes pas pour le plaisir de la polémique ni pour le marquage d’un territoire, mais plutôt parce qu’à travers cette recherche faussée, ce sont des conceptions ou des tendances préoccupantes pour les sciences sociales qu’il permet de mettre en lumière.

Une conception du travail, d’abord, dans laquelle on pourrait écrire sur n’importe quel sujet (et même en révéler des logiques cachées, en bénéficiant des gains symboliques et quelquefois matériels qui vont avec la posture des découvreurs) sans passer par le fastidieux travail d’appropriation de la bibliographie, des méthodes, des particularités en termes de sources et même des bases factuelles qui est l’ordinaire de l’immense majorité des chercheuses et des chercheurs. Sans passer, autrement dit, par une forme de modestie qui interdit de se penser spécialiste de tout, et qui est la seule condition d’une cumulativité du savoir en sciences sociales. Car c’est seulement en ayant conscience de ce qui s’est écrit auparavant dans un champ, et à quelles conditions, qu’on peut espérer y ajouter des savoirs probants, pouvant eux-mêmes être discutés et questionnés parce qu’ils respectent un cadre minimal de références communes. Il est vrai qu’une telle attitude de patience, de prudence, de modestie et d’inscription dans une discussion collective est peu compatible avec la recherche de financements comme avec l’exposition médiatique de résultats présentés comme spectaculaires.

Ce qui nous conduit au second point préoccupant du texte critiqué : la tendance qu’il révèle. En effet, au-delà des importantes limites méthodologiques et conceptuelles de la recherche dont il entend rendre compte, cet article, comme sa version longue en anglais, illustre avec force l’évolution de la recherche et ce faisant la manière dont celle-ci fait fausse route. « Humanités numériques », « big data » ou autre « data mining », les financements européens comme les programmes nationaux d’« Investissement d’Avenir » mobilisent des sommes considérables pour développer des protocoles de numérisation de « données » et d’archives qui visent à révolutionner l’écriture de l’histoire en mettant en évidence des corrélations invisibles : « construire le Facebook du passé » comme le dit Frédéric Kaplan porteur du projet « Time Machine Europe ». Comme dans le cas du travail réalisé par Julia Cagé, Anna Dagorret, Pauline Grosjean et Saumitra Jha, certaines de ces initiatives représentent un temps et une énergie (et souvent des budgets) considérables, et mobilisent de véritables savoir-faire, ici notamment en techniques d’analyse des données. Or, ces techniques peuvent s’avérer extrêmement riches pour l’analyse historique, lorsque la mise en données et l’exploration statistique sont réalisés par des chercheurs et chercheuses spécialistes dans leur domaine, scrupuleux dans la constitution de leur corpus.

Il est d’autant plus désolant de voir à quel point elles prennent parfois appui sur une méconnaissance de ce que sont vraiment les traces qu’ont laissées celles et ceux qui nous ont précédés dans l’histoire. Ce ne sont que des indices, comme l’a si bien formulé Carlo Ginzburg, et résoudre l’énigme de l’histoire à partir d’eux suppose d’avoir sans cesse conscience de la loupe à travers laquelle nous les regardons, comme de croiser les points à partir duquel nous leur donnons sens. À cet égard, la lecture ultra-contemporaine que les auteurs de l’article ont donnée de leur travail – l’attaque du Capitole dans la version d’AOC, la crise pandémique dans la version anglaise, plus ancienne – interpelle. Si le passé et le présent se font écho, tout n’est pas dans tout. Et pour réfléchir aux implications contemporaines de la crise démocratique des années 1930 et 1940, mieux vaudrait, d’abord, ne pas en déformer les réalités en s’affranchissant de la critique des sources.


[1] On emploiera désormais le féminin générique pour désigner « les auteures » du texte « De Verdun à Vichy ».

[2] Johnathan Bracken, The Verdun Regiment: Into the Furnace: The 151st Infantry Regiment in the Battle of Verdun 1916, Pen & Sword, 2018, p. 1. Les auteures s’appuient sur ce travail dans leur texte anglais (p. 23) sans avoir semble-t-il relevé ce passage. Elles remarquent dans une note de ce texte que d’autres unités comme les régiments d’artillerie « were organised at the broader region level and are therefore less suitable for our analysis », alors que le problème est identique, on le voit, pour les régiments d’infanterie.

[3] Jules Maurin, Armée – Guerre – Société. Soldats languedociens (1889-1919), Publications de la Sorbonne, 1982, p. 393-435.

[4] Dimitri Chavaroche, L’extraordinaire de la guerre. Le combat rapproché et le corps à corps sur le front ouest pendant la Première Guerre mondiale, thèse, Université Paris-I, 2021, p. 159-160.

[5] Erwan Le Gall, Le 47e régiment d’infanterie pendant la Première Guerre mondiale, thèse, Université Rennes-II, 2019, p. 321.

[6] Sa présentation repose sur le livre de Dominique Lormier, Les 100.000 collabos. Le fichier interdit de la collaboration française, Paris, Le cherche midi, 2017, qui a communiqué la liste aux auteures. Mais cet auteur, polygraphe aux plus de 130 livres, n’a pas effectué de véritable travail de contextualisation du document, dans un livre sans rigueur, conçu comme un coup éditorial (le fichier « interdit ») et dépourvu d’appareil critique. Par ailleurs les auteures indiquent que la liste a été établie sous la supervision de Paul Paillole, « head of French army intelligence after the war » (p. 23), ce qui est inexact : s’il a eu la liste en sa possession rien ne dit que le colonel Paillole l’ait compilée ou supervisée, et il a quitté l’armée en novembre 1944.

[7] D. Lormier, Les 100.000 collabos. Le fichier interdit de la collaboration française, p. 15.

[8] Voir par exemple les différents travaux menés par le Comité d’histoire de la Seconde guerre mondiale et l’IHTP, comme Michel Chanal, « La Collaboration dans l’Isère. 1940-1944 », Cahiers d’Histoire, t. XXII, 1977, p. 377-403 et « Enquête sur la Collaboration dans l’Isère. Problèmes méthodologiques », dans Bulletin de l’Institut d’Histoire du Temps Présent, n° 5, 1981, p. 15-31, ou encore sur les chiffres de l’Épuration, Henry Rousso, « L’épuration en France » dans Vichy. L’événement, la mémoire, l’histoire, Gallimard, 2001, p. 489-552.

[9] Nous reprenons ici les chiffres donnés par Philippe Burrin, La France à l’heure allemande : 1940-1944, Seuil, 1995.

[10] Antoine Prost, Les anciens combattants et la société française, 1914-1939, 3 volumes, Presses de la FNSP, 1977.

[11] Anne-Sophie Anglaret, La Légion française des combattants : sociabilités ordinaires et engagements politiques dans la Révolution nationale, 1940-1944, thèse, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2018.

[12] « Vigilance », La Légion, juillet 1941.

[13] Darnand était connu pour avoir participé à des coups de main en tant que membre de corps franc – une expérience minoritaire chez les combattants (Dimitri Chavaroche, thèse citée). Il a appartenu dans l’entre-deux-guerres à plusieurs groupes d’extrême-droite (Bertram Gordon, « Un soldat du fascisme : l’évolution politique de Joseph Darnand », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, 1977, vol. 27, n°108, p. 44.)

[14] Nicolas Mariot, « Faut-il être motivé pour tuer ? Sur quelques explications aux violences de guerre », Genèses, 2003/4 (n°53), p. 154-177 ; Ivan Ermakoff, Ruling Oneself Out. A Theory of Collective Abdication, Duke University Press, 2008.

Anne-Sophie Anglaret

Historienne

Tal Bruttmann

Historien

Sarah Gensburger

Chercheuse en sciences sociales, CNRS – Institut des Sciences sociales du Politique, Université de Paris Nanterre

André Loez

Historien, Professeur en classes préparatoires littéraires

Antoine Prost

Historien, Professeur émérite à l’Université Paris-I

Au temps du semblant

Par

« Puisque ces mystères nous dépassent, feignons de les organiser », écrivait Jean Cocteau. N’est-ce pas exactement ce que font les différents États face à la crise sanitaire actuelle ? Alors que règne le... lire plus

Notes

[1] On emploiera désormais le féminin générique pour désigner « les auteures » du texte « De Verdun à Vichy ».

[2] Johnathan Bracken, The Verdun Regiment: Into the Furnace: The 151st Infantry Regiment in the Battle of Verdun 1916, Pen & Sword, 2018, p. 1. Les auteures s’appuient sur ce travail dans leur texte anglais (p. 23) sans avoir semble-t-il relevé ce passage. Elles remarquent dans une note de ce texte que d’autres unités comme les régiments d’artillerie « were organised at the broader region level and are therefore less suitable for our analysis », alors que le problème est identique, on le voit, pour les régiments d’infanterie.

[3] Jules Maurin, Armée – Guerre – Société. Soldats languedociens (1889-1919), Publications de la Sorbonne, 1982, p. 393-435.

[4] Dimitri Chavaroche, L’extraordinaire de la guerre. Le combat rapproché et le corps à corps sur le front ouest pendant la Première Guerre mondiale, thèse, Université Paris-I, 2021, p. 159-160.

[5] Erwan Le Gall, Le 47e régiment d’infanterie pendant la Première Guerre mondiale, thèse, Université Rennes-II, 2019, p. 321.

[6] Sa présentation repose sur le livre de Dominique Lormier, Les 100.000 collabos. Le fichier interdit de la collaboration française, Paris, Le cherche midi, 2017, qui a communiqué la liste aux auteures. Mais cet auteur, polygraphe aux plus de 130 livres, n’a pas effectué de véritable travail de contextualisation du document, dans un livre sans rigueur, conçu comme un coup éditorial (le fichier « interdit ») et dépourvu d’appareil critique. Par ailleurs les auteures indiquent que la liste a été établie sous la supervision de Paul Paillole, « head of French army intelligence after the war » (p. 23), ce qui est inexact : s’il a eu la liste en sa possession rien ne dit que le colonel Paillole l’ait compilée ou supervisée, et il a quitté l’armée en novembre 1944.

[7] D. Lormier, Les 100.000 collabos. Le fichier interdit de la collaboration française, p. 15.

[8] Voir par exemple les différents travaux menés par le Comité d’histoire de la Seconde guerre mondiale et l’IHTP, comme Michel Chanal, « La Collaboration dans l’Isère. 1940-1944 », Cahiers d’Histoire, t. XXII, 1977, p. 377-403 et « Enquête sur la Collaboration dans l’Isère. Problèmes méthodologiques », dans Bulletin de l’Institut d’Histoire du Temps Présent, n° 5, 1981, p. 15-31, ou encore sur les chiffres de l’Épuration, Henry Rousso, « L’épuration en France » dans Vichy. L’événement, la mémoire, l’histoire, Gallimard, 2001, p. 489-552.

[9] Nous reprenons ici les chiffres donnés par Philippe Burrin, La France à l’heure allemande : 1940-1944, Seuil, 1995.

[10] Antoine Prost, Les anciens combattants et la société française, 1914-1939, 3 volumes, Presses de la FNSP, 1977.

[11] Anne-Sophie Anglaret, La Légion française des combattants : sociabilités ordinaires et engagements politiques dans la Révolution nationale, 1940-1944, thèse, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2018.

[12] « Vigilance », La Légion, juillet 1941.

[13] Darnand était connu pour avoir participé à des coups de main en tant que membre de corps franc – une expérience minoritaire chez les combattants (Dimitri Chavaroche, thèse citée). Il a appartenu dans l’entre-deux-guerres à plusieurs groupes d’extrême-droite (Bertram Gordon, « Un soldat du fascisme : l’évolution politique de Joseph Darnand », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, 1977, vol. 27, n°108, p. 44.)

[14] Nicolas Mariot, « Faut-il être motivé pour tuer ? Sur quelques explications aux violences de guerre », Genèses, 2003/4 (n°53), p. 154-177 ; Ivan Ermakoff, Ruling Oneself Out. A Theory of Collective Abdication, Duke University Press, 2008.