écologie

L’agriculture comme système écologique et culturel – Nourrir le monde ? (1/2)

Agronome

Les enjeux de l’agriculture à l’heure de la crise environnementale figurent au programme du Congrès mondial de la nature qui vient de s’ouvrir à Marseille. À l’heure de la surproduction, alors que les inégalités alimentaires n’ont jamais été aussi fortes et que l’agriculture conserve la mission essentielle de nourrir le monde, pourquoi n’aurait-elle pas aussi celle de l’enchanter ?

«Nourrir le monde » parait être la mission essentielle de l’agriculture. Voilà ce qui fait, à leurs yeux et pour l’opinion en général, l’identité des agriculteurs, ce qui constitue l’objectif premier des sciences agronomiques sous la forme d’une course au rendement et ce qui légitime les politiques agricoles dites de modernisation de l’agriculture.

Certes, depuis qu’il est devenu difficile d’ignorer la crise écologique et la responsabilité de l’agriculture industrielle dans celle-ci, la recherche agronomique, les responsables agricoles et les programmes politiques affichent le double objectif « nourrir le monde et sauver la planète ». Derrière ce beau consensus, les divergences sont profondes sur les moyens, mais, à l’exception de quelques voix discordantes, il s’agirait toujours de produire plus, mais avec moins.

publicité

L’objectif de ce texte est de s’interroger sur ce que veut dire « nourrir le monde » à une époque où l’agriculture produit des excédents, ainsi que sur la nature de ces excédents.

Aujourd’hui, la production agricole, dans des proportions importantes, a d’autres fins que la seule fonction nourricière nécessaire à la survie de l’humanité. Depuis la révolution industrielle et l’utilisation de l’énergie fossile, l’humanité dispose pour se nourrir de plus de terres qu’il n’en faut. L’évolution séculaire dans nos sociétés occidentales, qui contredit bon nombre de représentations actuelles, a été tant celle d’une réduction de la superficie cultivée et des prix des produits agricoles de base que la réduction de la part du temps de travail au cours de la vie.

Mais cette évolution s’est aussi finalement traduite par un accroissement des inégalités sociales. Les débats sur le « monde d’après » suscités par la pandémie actuelle sont-ils en mesure de changer la vision des enjeux sur l’agriculture et l’alimentation, en rapport avec l’idée d’une vie bonne ?

Manger pour (sur)vivre

Si on en reste à une conception basique de la nourriture pour survivre, l’idée que


[1] Jean-Paul Charvet, Atlas de l’agriculture. Comment pourra-t-on nourrir le monde en 2050 ?, éditions Autrement, 2010.

[2] René Dumont, L’Utopie ou la Mort !, éditions du Seuil, 1973.

Gilles Allaire

Agronome

Notes

[1] Jean-Paul Charvet, Atlas de l’agriculture. Comment pourra-t-on nourrir le monde en 2050 ?, éditions Autrement, 2010.

[2] René Dumont, L’Utopie ou la Mort !, éditions du Seuil, 1973.