Projets de monnaie, projets de société
L’actualité monétaire est agitée. Les initiatives monétaires se multiplient. Les cryptomonnaies, les monnaies locales ou complémentaires, les mesures non conventionnelles de la banque centrale, les taux d’intérêt à zéro voire négatifs, les nouvelles théories monétaires intriguent les citoyens en quête de nouveaux repères dans un monde monétaire bousculé. « Dois-je épargner en cryptomonnaies ? », « Est-il utile d’utiliser une monnaie locale ? », « La finance verte l’est-elle réellement ? », « Le système bancaire peut-il proposer des solutions contre les dérèglements climatiques ? », sont des questions que se posent nombre d’entre nous.

Porté par ces transformations monétaires, le débat d’idées se fait plus vif. Émergent depuis quelques années des propositions de monnaie hélicoptère[1], de monnaie libre de dette au service de la reconstruction écologique[2] ou plus largement de dons monétaires au service du bien commun[3]. Si la monnaie hélicoptère est le plus souvent présentée comme un nouvel instrument qui permettrait aux banques centrales de s’affranchir des problèmes de transmission de leur action monétaire à l’économie réelle, la plupart de ces propositions sont motivées par des critiques plus profondes du système monétaire et financier actuel analysé comme la matrice des dérèglements environnementaux, sociaux, économiques et financiers.
Ces propositions, tout comme les initiatives monétaires actuelles y compris celles des banques centrales, sont chacune porteuses d’un choix de société, parfois explicite, souvent implicite. Car aucun système monétaire n’est naturel, il est toujours une construction sociale orientée vers des objectifs plus ou moins explicites, fruit d’une histoire, fruit de critiques, de compromis, de rapports de force politiques parfois houleux[4] privilégiant les intérêts des uns ou des autres. Tout projet de réforme monétaire est donc nécessairement aussi un projet de société.
Vues sous cet angle, les questions monétaires deviennent u