La couverture sanitaire universelle : un toit percé depuis trop longtemps
«Des médecins en grève ? Ils n’ont qu’à soigner les riches et se taire, les pauvres s’adresseront aux marabouts ! ». Alors que se tient ce dimanche 12 décembre une journée mondiale consacrée à la couverture sanitaire universelle (CSU), cette phrase tirée du dernier roman du mauritanien Mbarek Ould Beyrouk, pointe, à elle seule, les principaux défis de cette vaste ambition : financement, inégalités, pouvoir et qualité des soins.
Ainsi, contrairement à ce qu’affirmait le Directeur général de l’OMS au moyen d’une métaphore malheureuse « Réparer le toit avant que la pluie n’arrive », il semble que le toit soit percé depuis trop longtemps, pour des personnes qui voient tomber la pluie depuis des lustres sans que de réelles actions ne soient organisées pour les soutenir. W.E.B Du Bois ne disait-il pas, à une autre époque, que « la science seule ne pouvait pas régler la question, l’action devait venir à son aide » ?

À l’image des analyses du sociologue Ray Pawson sur la pandémie de Covid-19 et de l’anthropologue Wenzel Geissler sur les « secrets publics » de la santé publique, nous souhaitons revenir dans ce texte sur les défis trop souvent oubliés et les « non-dits » de la CSU.
Le renforcement des systèmes de santé : un éternel oublié ?
La définition consacrée de la CSU est le fait que toutes et tous puissent bénéficier de soins de santé de qualité, en fonction de leurs besoins, sans que leur recours aux systèmes de santé puisse avoir des conséquences financières pour leur famille[1].
Mais cette définition technique, voire bureaucratique, est aussi indispensable aux experts qu’elle est éloignée de la réalité des personnes les plus vulnérables dans les pays économiquement développés et de la majorité des populations des pays dits à faible revenu. Gilbert Abotisem Abiiro et Manuela De Allegri ont en effet montré que le concept de la CSU pouvait être perçu de manière très différente selon qu’on l’évoque sous l’angle juridique, humanitaire, économique, social ou de