Angela Merkel et les réfugiés
Angela Merkel a officiellement quitté ses fonctions de chancelière d’Allemagne le 2 décembre dernier. Un épisode se détache de son formidable parcours : son comportement pendant la « crise européenne des réfugiés », qui la sépare à jamais de tous les chefs d’État européens. Chacun se souvient de quelle manière elle laissa littéralement sur place François Hollande et la plupart de ses collègues européens. Avec le recul, nous disposons des données objectives et des points de comparaison qui permettent de dresser un bilan durable de ce grand moment.

La crise éclate au grand jour en août 2015, quand les médias commencent à diffuser en boucle les images de familles syriennes ou afghanes qui cherchent à franchir à pied la frontière serbo-hongroise. Les origines de la crise sont plus anciennes. Elles remontent au moins au Printemps arabe (2010-2012), avant de changer de dimension en 2014 avec l’extension de la guerre civile en Syrie et l’implantation de l’État islamique entre la Syrie et l’Irak. Dès 2014, les ONG et le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) signalent l’afflux grandissant des réfugiés dans les camps des pays limitrophes et aux frontières de l’Europe. Ils alertent les gouvernements et les donateurs : les fonds récoltés n’autorisent plus qu’une gestion au rabais des camps installés en Turquie ou au Liban. Mais ces appels rencontrent peu d’écho et c’est là une leçon qui ne sera guère retenue par la suite : savoir anticiper les crises en se mettant à l’écoute des acteurs qui œuvrent en première ligne.
La pénurie est telle dans les camps de Turquie que les réfugiés tentent le tout pour le tout : passer en Grèce dans l’espoir de gagner l’Autriche ou l’Allemagne. Ils empruntent jusqu’en août 2015 la route centrale des Balkans via la Serbie et la Hongrie, puis, une fois la frontière hongroise fermée, la route occidentale via la Croatie et la Slovénie. Fidèle à sa tradition, l’Autriche se mobilise pour assurer un accueil d’urgence mais cons