Politique

L’intérêt pour les blogs d’extrême droite dans les quartiers populaires urbains

Sociologue

Une enquête menée dans des quartiers populaires urbains permet d’éclairer les raisons qui poussent certains jeunes adultes à consulter des blogs d’extrême droite. La rhétorique antisémite, raciste, anti-élite et « antisystème » d’Alain Soral, Dieudonné et une panoplie de « conférenciers » trouve un certain écho auprès de personnes en rupture de confiance avec les institutions de manière générale.

En menant une enquête auprès d’adultes rencontrés dans leur quartier durant un travail en immersion, nous avons tenté d’appréhender les processus qui ont conduit la majorité de nos enquêtés à se détourner des médias traditionnels pour consulter des sites internet et des discours contestataires à l’encontre des institutions et du politique en général. De quelles façons nos enquêtés se sont orientés vers des sites ou blogs d’extrême droite, antisémites, conspirationnistes ou contestataires ? Si les idées lepénistes ont fait leur chemin depuis les années 1980, celles de Zemmour marquent un accélérateur indéniable ces dernières années, suivies de près – car jumelles à de nombreux égards – par celles développées par Alain Soral. Il est donc question ici de proposer un regard sur les idées d’extrême droite et leurs éventuels impacts sur certaines jeunesses françaises en proie aux incertitudes et au déclassement.

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Le site Égalité et Réconciliation en tête de gondole

Les travaux académiques qui traitent de l’extrême droite « conspirationniste » sur les réseaux sociaux sont assez rares. Pourtant ces blogs sont plutôt florissants sur la toile. Tout d’abord, le site Égalité et Réconciliation – le plus consulté – tenu par Alain Soral[1]. Nous pouvons énumérer aux côtés de Soral la présence d’un grand nombre de ses collaborateurs[2]. En effet, nous dénombrons pas moins d’une dizaine de collaborateurs présents sur le site Égalité et Réconciliation, sans oublier d’autres blogueurs proches de la mouvance soralienne.

« Il n’y a pas que Soral. Youssef Hindi est pas mal sur le messianisme juif ; Lucien Cerise sur les manipulations des médias ; Laurent Guyennot sur Kennedy est intéressant. Il y a aussi Pierre Hillard… »
(44 ans, habitant une cité HLM, diplôme bac+5, marié, trois enfants, gérant d’un hôtel)

« Il y a pas mal de chroniqueurs chez Soral. Ils ont des spécialités. Y en a que j’écoute assez régulièrement. Après il ne faut pas tout prendre, mais disons que ça te perme


[1] Dit Alain Bonnet de Soral, comédien, réalisateur, vidéaste, chef d’entreprise et idéologue d’extrême droite franco-suisse.

[2] Nous citerons ici les « conférenciers » les plus connus de nos enquêtés comme Pierre Hillard ou Youssef Hindi.

[3] Marc-Édouard Nabe, de son vrai nom Alain Zanini, est musicien, peintre et surtout écrivain. C’est en tant que polémiste que Nabe est connu des quadragénaires.

[4] André Déchot, Jean-Paul Gautier et Michel Briganti, La galaxie Dieudonné. Pour en finir avec les impostures, Syllepse, 2011.

[5] Une majorité de nos enquêtés s’estiment en bas de l’échelle alors que les membres de la communauté juive, selon eux, occupent les postes-clés dans la finance, les médias, les « affaires » et la politique. Lors de conversations informelles, certains enquêtés me rappellent avec détermination le rôle de Jacques Attali, l’importance de Patrick Drahi, l’influence d’un Bernard-Henri Lévy ou d’un Alain Finkielkraut dans les grands médias.

[6] Notre interviewé fait aussi allusion à un ouvrage publié dans la maison d’édition Kontre Kulture créée par Soral : L’Effroyable Imposture du rap écrit par un certain Mathias Cardet. Un ouvrage qui explique que certains membres de la communauté juive ont pris le contrôle du rap en détournant son potentiel révolutionnaire pour le « dévoyer » vers l’égotrip, le capitalisme et le racisme antifrançais. Mathias Cardet a d’ailleurs récemment fait parler de lui : de son vrai nom Thomas NLend, il vient de publier un ouvrage avec une préface de Caroline Fourest où il a prétendu infiltrer le groupe fasciste d’Alain Soral.

[7] Éric Marlière, « Du communisme à l’islam. Réflexions sur la violence politique », Esprit, 460, 12, 2019, p. 98-107.

[8] Dans un entretien effectué au début des années 2000, un jeune cadre d’une trentaine d’années issu de l’immigration algérienne m’expliquait : « Quand j’allume ma télé, je vois des juifs qui m’insultent de tous les noms : des Finkielkraut, des Henri-Lévy, des Glucksmann, etc. Eh b

Éric Marlière

Sociologue, Maître de conférences à l’université de Lille et chercheur au CeRIES

Notes

[1] Dit Alain Bonnet de Soral, comédien, réalisateur, vidéaste, chef d’entreprise et idéologue d’extrême droite franco-suisse.

[2] Nous citerons ici les « conférenciers » les plus connus de nos enquêtés comme Pierre Hillard ou Youssef Hindi.

[3] Marc-Édouard Nabe, de son vrai nom Alain Zanini, est musicien, peintre et surtout écrivain. C’est en tant que polémiste que Nabe est connu des quadragénaires.

[4] André Déchot, Jean-Paul Gautier et Michel Briganti, La galaxie Dieudonné. Pour en finir avec les impostures, Syllepse, 2011.

[5] Une majorité de nos enquêtés s’estiment en bas de l’échelle alors que les membres de la communauté juive, selon eux, occupent les postes-clés dans la finance, les médias, les « affaires » et la politique. Lors de conversations informelles, certains enquêtés me rappellent avec détermination le rôle de Jacques Attali, l’importance de Patrick Drahi, l’influence d’un Bernard-Henri Lévy ou d’un Alain Finkielkraut dans les grands médias.

[6] Notre interviewé fait aussi allusion à un ouvrage publié dans la maison d’édition Kontre Kulture créée par Soral : L’Effroyable Imposture du rap écrit par un certain Mathias Cardet. Un ouvrage qui explique que certains membres de la communauté juive ont pris le contrôle du rap en détournant son potentiel révolutionnaire pour le « dévoyer » vers l’égotrip, le capitalisme et le racisme antifrançais. Mathias Cardet a d’ailleurs récemment fait parler de lui : de son vrai nom Thomas NLend, il vient de publier un ouvrage avec une préface de Caroline Fourest où il a prétendu infiltrer le groupe fasciste d’Alain Soral.

[7] Éric Marlière, « Du communisme à l’islam. Réflexions sur la violence politique », Esprit, 460, 12, 2019, p. 98-107.

[8] Dans un entretien effectué au début des années 2000, un jeune cadre d’une trentaine d’années issu de l’immigration algérienne m’expliquait : « Quand j’allume ma télé, je vois des juifs qui m’insultent de tous les noms : des Finkielkraut, des Henri-Lévy, des Glucksmann, etc. Eh b