International

Fratelli d’Italia : un succès et des interrogations

Historien et sociologue de la politique

Appelée à devenir présidente du Conseil après la victoire de son parti Fratelli d’Italia, Georgia Meloni aura fort à faire pour appliquer son programme, amalgame de mesures socio-économiques contradictoires et de prêches nationalistes. D’autant que ce succès électoral apparaît d’abord comme le résultat d’un ras-le-bol généralisé à l’égard de la classe politique. Et qu’elle entretient avec ses alliés de profondes divergences, notamment sur les questions internationales.

Frères d’Italie a remporté un succès considérable lors du scrutin du 25 septembre. Cette petite formation, qui avait obtenu un peu plus de 4,4 % il y a 5 ans à la Chambre des députés, a rassemblé cette fois plus d’un électeur sur quatre. Fratelli d’Italia est désormais le premier parti, non seulement dans la coalition qu’il forme avec la Ligue de Matteo Salvini (8,8 %) et Forza Italia de Silvio Berlusconi (8,2 %), mais également par rapport à tous les autres partis politiques, le deuxième étant le Parti démocrate (PD) qui stagne à 18,9 % (contre 18,7 % en 2018).

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Il faut imaginer ce que représente ce résultat pour les militants et les dirigeants les plus anciens et aguerris, longtemps tenus pour quantité négligeable, quasiment marginalisés, souvent brocardés ou ridiculisés par leurs alliés et leurs adversaires, tandis que leur présidente Georgia Meloni était la plupart du temps sous-estimée. Il en résulte qu’un certain nombre d’entre eux pourraient être animés d’un sentiment de revanche susceptible d’influencer la prise de décision de la majorité parlementaire et du futur gouvernement.

Depuis des semaines où s’écrivait la chronique de la victoire annoncée du centre droit, qu’il faut désormais appeler de droite-centre au vu du poids acquis en son sein par Frères d’Italie, tout ou presque tout a été dit et écrit sur ce parti et sur sa dirigeante. Les chercheurs hésitent sur leur caractérisation : l’un et l’autre sont-ils post-fascistes, d’extrême droite, de droite radicale, conservateurs, traditionalistes, populistes ? Cela reflète la difficulté présente à saisir la progression foudroyante et les changements de Fratelli d’Italia.

En effet, son identité combine à la fois des invariants découlant des conditions et des éléments constitutifs de sa création, ce que le politiste italien Angelo Panebianco appelle le modèle génétique d’une organisation partisane, et des nouveautés introduites progressivement, surtout depuis que la victoire se profilait de plus en plu


Marc Lazar

Historien et sociologue de la politique, Professeur des universités