De l’activisme écologiste dans les musées
«J’ai souvent l’impression de filmer une version réelle du film Don’t Look Up[1] », ironise Rich Felgate, le jeune réalisateur qui a récemment capté de nombreuses actions du collectif d’activistes écologistes Just Stop Oil[2]. En effet, de récentes études en psychologie environnementale mettent en évidence une forme de dissonance cognitive entre, d’une part, la disponibilité de l’information scientifique relative à la crise climatique et, d’autre part, le comportement des individus et les décisions des gouvernants[3]. Les actions de résistance civile qui prennent place autour d’œuvres d’art, depuis le début de l’été 2022, dans divers musées en Europe et en Australie, et qui se sont multipliées ces dernières semaines (on en compte jusqu’ici une vingtaine), ont pour objectif de pointer cette contradiction.

Nous proposons d’analyser la manière dont elles s’inscrivent dans une stratégie d’occupation du champ médiatique ayant vocation à créer une prise de conscience, et surtout à pousser les pouvoirs publics à sortir de leur léthargie. Il nous semble intéressant d’observer la manière dont le mode opératoire de ces activistes et la nouvelle interprétation des œuvres qui est formulée à cette occasion sont mis au service de l’explication de revendications concrètes, alignées sur les recommandations scientifiques visant à réduire les émissions de CO2 des États, qui sont explicitées lors de leurs opérations ou dans les communiqués de presse qui les accompagnent : fermeture d’exploitations d’énergies fossile, basculement vers une certaine quantité d’énergies renouvelables dans un délai donné.
Stratégie et organisation en réseau
Des cas isolés d’actions protestataires sur des d’œuvres d’art exposées dans des musées ont eu lieu à intervalles réguliers ces dernières décennies[4]. Uriel Landeros, l’artiste qui a utilisé une bombe de peinture et un pochoir pour apposer le dessin d’un taureau et le mot « Conquista » sur Femme au fauteuil rouge de Pablo Picasso, en 2012 à