Éducation

Enseigner face aux enjeux de laïcité, discriminations et racisme

Sociologue, Socoiologue

A l’instar du cas récent du lycée Ravel, les atteintes à la laïcité sont surmédiatisées alors même qu’elles ne représentent que 3% des incidents graves qui surviennent dans le premier degré comme dans le second degré de l’éducation nationale. Une grande enquête pluridisciplinaire montre comment, dans l’ensemble, les professionnels de l’enseignement public parviennent à surmonter les difficultés en faisant preuve d’une conception libérale de la laïcité qui valorise l’individu et sa liberté de conscience, son autonomie de pensée et de choix.

«Qu’on me donne six lignes écrites de la main du plus honnête homme, j’y trouverai de quoi le faire pendre », affirmait Jean Martin de Laubardemont (vers 1590-1656), magistrat exécuteur zélé des volontés de Richelieu et du roi Louis XIII, célèbre pour avoir envoyé de nombreux « sorciers » et « sorcières » au bûcher notamment dans le Béarn et à Loudun. Cette citation n’est pas sans évoquer la situation contemporaine quand il est question de laïcité, de racisme, de discriminations en milieu scolaire.

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Nombreuses sont en effet les statues du Commandeur qui prétendent dire la norme et sont à l’affût de la moindre phrase qui pourrait justifier à leurs yeux la condamnation de son ou de ses auteurs pour atteinte à la laïcité, complaisance à l’égard des islamistes, antisémitisme, ou, dans un autre registre, oppression des minorités et racisme.

Les ministres de l’éducation nationale contribuent à ces qualifications et à la mise en place de catégories qui sont autant d’outils cognitifs dont la diffusion a des conséquences sur l’action éducative. Quoi de commun entre les conceptions de la laïcité de Vincent Peillon, Najat Vallaud-Belkacem, Jean-Michel Blanquer, Pap Ndiaye ainsi que des éphémères ministres Gabriel Attal et Amélie Oudéa-Castéra ou de la récente Nicole Belloubet, pour ne parler que de la période marquée par des attentats islamistes et les multiples ondes qui ont suivi, remettant sur le devant de la scène la question de la laïcité et le rôle de l’éducation ? Cette cacophonie accroît la nécessité, pour les professionnels en milieu scolaire, de justifier sans cesse leur action à la fois pour eux-mêmes et vis-à-vis d’autrui.

Les interprétations de la laïcité par les ministres, libérales ou nationale-identitaires, tantôt anhistoriques teintées de normalisation et tantôt inclusives à visée émancipatrice, se manifestent par des postures politiques orientées plutôt par le projet éducatif ou plutôt par la sanction, la coercition (interdiction de l’abaya par Gabri


[1] Émile Durkheim, Sociologie politique. Une anthologie, textes édités et introduits par Florence Hulak, Presses universitaires de France, 2020 p. 106.

[2] Op. cit., p. 121

[3] Op. cit., p. 106.

Françoise Lantheaume

Sociologue, Professeure des universités émérite en sciences de l’éducation et de la formation à l’université Lyon 2

Sébastien Urbanski

Socoiologue, Maître de conférences HDR en sciences de l’éducation et de la formation à Nantes Université

Notes

[1] Émile Durkheim, Sociologie politique. Une anthologie, textes édités et introduits par Florence Hulak, Presses universitaires de France, 2020 p. 106.

[2] Op. cit., p. 121

[3] Op. cit., p. 106.