Politique

Le peuple à venir (1/2) : union de la droite vs front populaire

Philosophe

Face à l’hypothèse invraisemblable – mais qu’on ne saurait pourtant exclure – d’un partage consensuel du pouvoir entre Macron et le RN, il convient de réfléchir à ce que veut dire un Nouveau Front Populaire, sans le théoriser mais en pointant tout à la fois ses difficultés et ses potentialités.

La catastrophe politique qui s’est abattue sur la France le 9 juin dernier a pris de court beaucoup d’entre nous, et pourtant elle était largement annoncée. D’abord par les sondages, même s’il ne faut pas toujours les croire. Mais surtout, par les décennies de montée du Front-Rassemblement National dans les élections et dans l’opinion, qui ne cessait de s’accélérer en élargissant sa base dans la dernière période.

publicité

Derrière cette ascension, une série de causes qui convergent, et dont chacune est bien connue. Erreurs des responsables politiques « républicains » qui se sont crus capables d’instrumentaliser Le Pen ou sa fille (faut-il oublier que Mitterrand lui-même y céda ?). Acceptation rampante de l’idée que « l’immigration est un vrai problème », non seulement économique (alors que sans les immigrés, y compris sans papiers, la France ne tournerait pas), mais par la diversité culturelle ou religieuse qu’elle installe dans la société française comme partout dans le monde. Compromis avec l’idéologie sécuritaire et autoritaire dont le RN est le propagandiste inlassable. Mais aussi ignorance ou mépris des angoisses et des souffrances qu’engendre dans la société une mondialisation dévastatrice, qui partout aujourd’hui favorise la montée du nationalisme. Exténuation du débat politique au profit d’une gouvernance fondée sur le postulat de « l’ignorance du peuple » et d’une invasion de l’espace public par les « réseaux sociaux » commercialisés.

En conséquence, dénigrement hautain ou répression violente de tous les mouvements qui, année après année, expriment les demandes de la société et recréent de la participation civique. Et pour couronner le tout la démoralisation et la désorientation que produisent sur le « peuple de gauche » les divisions, la stagnation intellectuelle, l’esprit de chapelle, les revirements opportunistes ou les trahisons répétées de leurs engagements des partis que leur histoire destinait à incarner une alternative au système économique dominan


[1] Je pense en particulier au tir de barrage sur le thème « Blum doit se retourner dans sa tombe » de la part de Manuel Valls, Bernard Cazeneuve et d’autres, à qui l’arrière-petit-fils de Léon Blum, Antoine Malamoud, a répondu avec rigueur et dignité dans Mediapart.

[2] Ayant écrit ceci, je prends connaissance d’analyses qui vont dans le même sens : par exemple celle très convaincante de Jean-François Bayart. L’ancien président Nicolas Sarkozy, dont la proximité avec Emmanuel Macron est avérée, vient de déclarer (16 juin) que l’alliance avec le RN telle que cherche à l’imposer Éric Ciotti est « aujourd’hui inopportune », ce qui veut dire qu’elle ne le sera pas nécessairement demain.

Étienne Balibar

Philosophe

Mots-clés

Gauche

Notes

[1] Je pense en particulier au tir de barrage sur le thème « Blum doit se retourner dans sa tombe » de la part de Manuel Valls, Bernard Cazeneuve et d’autres, à qui l’arrière-petit-fils de Léon Blum, Antoine Malamoud, a répondu avec rigueur et dignité dans Mediapart.

[2] Ayant écrit ceci, je prends connaissance d’analyses qui vont dans le même sens : par exemple celle très convaincante de Jean-François Bayart. L’ancien président Nicolas Sarkozy, dont la proximité avec Emmanuel Macron est avérée, vient de déclarer (16 juin) que l’alliance avec le RN telle que cherche à l’imposer Éric Ciotti est « aujourd’hui inopportune », ce qui veut dire qu’elle ne le sera pas nécessairement demain.