Économie

L’État, le fantôme de Viva Tech

Sociologue, Sociologue

Même s’il est peu mis en avant dans les salons de nouvelles technologies comme Viva Tech, l’État est un acteur majeur du financement de l’innovation en France à travers la banque publique d’investissement Bpifrance. Derrière un discours méritocratique et égalitaire, le processus de choix des projets que l’État accompagne favorise plutôt des projets déjà acculturés à la logique des start-up, contribuant à renforcer certaines inégalités.

Du 11 au 14 juin s’est tenue, au Parc des expositions de Paris, la 9ème édition du Salon Viva Tech – « le » rendez-vous devenu incontournable des start-up et de l’innovation, qui réunit chaque année entreprises, investisseurs et passionnés de technologie. Moment de célébration de la « start-up nation », il est l’occasion pour des entrepreneur·ses à la tête de petites entreprises destinées à une forte croissance de faire montre de leur capacité à conjuguer agilité managériale, profitabilité financière et souci de répondre à des enjeux collectifs en développant des produits innovants. Or, cette vitrine de la réussite entrepreneuriale moderne laisse dans l’ombre un acteur pourtant central dans le développement de l’entrepreneuriat et de l’innovation : l’État.

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À Vivatech, l’État est pourtant omniprésent. D’abord, car il s’incarne derrière la figure du président Emmanuel Macron qui, depuis la mise en place de ce salon en 2016, n’a jamais manqué un seul rendez-vous. Chaque année, il est attendu avec impatience pour prononcer son discours, où il célèbre les vertus des entreprises et le courage des entrepreneur·ses français·es. La puissance publique est également présente sur l’évènement dans différents stands, notamment au travers de celui de la French Tech. Ce service de Bercy, aussi connue par l’entremise du petit coq en origami rouge qui lui sert de logo, est devenu l’emblème des politiques publiques destinées à promouvoir le déploiement de politiques d’innovation sur le territoire national. Mais de manière moins ostentatoire, l’État est présent dans l’ensemble des allées du salon, puisque rares sont les start-up ou les entreprises innovantes qui n’ont pas recours aujourd’hui aux aides ou crédits publics pour amorcer et développer leurs activités.

Le rôle de l’État est pourtant bien souvent occulté des récits entrepreneuriaux, qui préfèrent mettre l’accent sur les prouesses et le mérite individuels des entrepreneurs. Cette rhétorique de l’entrepreneur a imprég


Marion Flécher

Sociologue, Maîtresse de conférences à l’Université Paris Nanterre, IDHE.S (UMR CNRS 8533) et chercheuse associée au CEET (Centre d’études de l’emploi et du travail)

Jean-Baptiste Devaux

Sociologue, Maître de conférences en sociologie à Grenoble INP - Université de Grenoble et chercheur au laboratoire PACTE