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L’Amérique à l’encan ? (2/2) La présidence Trump, un cas d’école

Historien, Économiste

Entre lobbying intensif, grâces présidentielles, lancement de sa cryptomonnaie ou démantèlement des organes de surveillance, il est euphémique de dire que Trump ne rechigne pas à faire usages de ses fonctions présidentielles au profit de ses intérêts personnels. Les taux de corruption fragilisent la confiance du public envers ses institutions, et encore davantage un système juridique vulnérable à ce type d’abus.

L’administration Trump a été caractérisée par un nombre sans précédent de conflits d’intérêts, avec plus de 3 700 cas documentés. Cette situation découle en grande partie du refus de Donald Trump de se désinvestir de la Trump Organization et de sa décision de la faire gérer par ses enfants plutôt que par une fiducie anonyme, ce qui a créé un lien direct entre sa présidence et ses intérêts personnels. Cette décision représente une rupture fondamentale avec les normes éthiques établies et les précédents juridiques conçus pour séparer les intérêts financiers d’un fonctionnaire public de ses devoirs gouvernementaux. En conservant un contrôle direct et en permettant aux membres de sa famille de gérer l’entreprise, l’administration a effectivement fusionné l’entité commerciale privée avec la fonction publique de la présidence. Cette action a créé un précédent dangereux qui pourrait normaliser l’utilisation du pouvoir présidentiel pour en faire bénéficier directement des entreprises commerciales privées, sapant le principe fondamental selon lequel la fonction publique est une charge ou une mission à exercer uniquement pour le bien public, et non pour un gain financier personnel. La leçon des juristes d’Ancien Régime sur l’investissement privé et la dette publique et surtout sur le sens même de l’office, est bien oubliée.

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En outre, le lien direct entre la présidence et les intérêts privés du président aurait conduit à un enrichissement personnel par le biais de gouvernements étrangers et de groupes d’intérêt spéciaux. Donald Trump a promu ses propriétés comme des annexes de la résidence politique de la Maison Blanche, y menant des affaires officielles. De nombreux membres du Congrès, fonctionnaires et gouvernements étrangers ont utilisé ses propriétés pour des événements liés à des groupes d’intérêt. À chaque fois, ces personnes et entités ont dû payer leur hébergement, la restauration et toutes les activités annexes, générant ainsi des millions de dollars de reve


Olivier Christin

Historien, Directeur d'études à l'EPHE et directeur du Centre européen d'études républicaines

André Tiran

Économiste, Professeur émérite de sciences économiques à l'Université Lyon 2