Cinéma

Plaire, Aimer, et courir vite – à la vie comme au cinéma

Critique

Avec Plaire, aimer, et courir vite, Christophe Honoré livre l’un de ses films les plus accomplis. Cette histoire d’amour distanciée qui portraiture aussi le début des années 1990, brille par sa mise en scène et ses acteurs principaux, formidables dans leurs rôles à contre-emploi.

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1993. Paris : Jacques (Pierre Deladonchamps) est un écrivain de 35 ans qui peine à écrire le roman sur lequel il travaille. Il vit dans le même immeuble que Mathieu (Denis Podalydès), son ex-amant devenu son ami. Il est atteint du sida, et sa mort approche à grand pas.

Rennes : Arthur (Vincent Lacoste) est un jeune étudiant de 22 ans qui ne va plus en cours depuis longtemps, rêve de monter à Paris pour réussir dans le milieu littéraire ou cinématographique, et cache à sa copine comme à ses parents son homosexualité, qu’il vit souterrainement en fréquentant des lieux de drague gay.

Les deux hommes vont se rencontrer, par hasard, dans un cinéma rennais qui projette La Leçon de piano de Jane Campion. S’ensuivra une relation amoureuse d’abord manquée par la distance que prend Jacques, avant de s’épanouir progressivement, jusqu’à la visite d’Arthur à Paris. Cette histoire d’amour est souvent à distance : Honoré montre les deux personnages de façon disjointe, chacun dans leurs histoires et leurs déboires. Aussi prend-t-elle un tour épistolaire, parfois, comme dans cette très belle lettre de Jacques à Arthur que l’on découvre défilant en caractères blancs sur l’écran.

Il faut déjà saluer la prestation des acteurs. Vincent Lacoste porte ici un rôle à contre-emploi, lui qui a une image assez marquée du côté hétérosexuel, depuis ses débuts dans Les Beaux Gosses où seules les filles l’obsédaient, en passant par Jackie au royaume des filles, Lolo, jusqu’à Victoria. Dans le cinéma d’auteur auquel il reste fidèle, la persona de Lacoste a connu une ascension dans sa séduction auprès de la gente féminine, mais restait largement associée à son hétérosexualité. Avec son personnage d’Arthur, Lacoste prend le risque de rompre avec cette image dominante, et Honoré semble s’être amusé, malicieusement, à insister sur l’absence de désir du personnage pour les femmes, notamment dans cette scène au début qui, usant du plan long, insiste beaucoup sur les jambes et les fesses seulem


[1] Yannick Haenel, Tiens ferme ta couronne, Paris, Gallimard, collection « L’infini », p. 87.

[2] Ibid., p. 74.

Aurélien Gras

Critique, Doctorant en études cinématographiques

Rayonnages

Cinéma Culture

Notes

[1] Yannick Haenel, Tiens ferme ta couronne, Paris, Gallimard, collection « L’infini », p. 87.

[2] Ibid., p. 74.