Rediffusion

August Sander condense son siècle en portraits

Historien

Avec August Sander, Persécutés/persécuteurs, des Hommes du XXe siècle le Mémorial de la Shoah expose des séries de portraits donnant à voir les contemporains du photographe rhénan : sa famille mais aussi « ceux qui sont marqués par la vie ». Cette retrospective saisissante se poursuit jusqu’au 15 novembre 2018. Rediffusion d’été.

August Sander est un photographe rhénan dont la vie s’agence de 1876 à 1964. Enfant de mineur, il échappe au puit en devenant photographe à l’occasion de son service militaire. Le périple de son existence le ramène à Cologne où il s’établit en 1904 après avoir écumé Allemagne et Autriche. Revenu vivant et entier, mais visiblement marqué, de la Grande Guerre, il commence une série de portraits en 1920 ; une série de portraits qui condense le siècle.

C’est cette série de portraits que documente la belle exposition présentée par le Mémorial de la Shoah. En deux centaines de clichés, c’est un monde et une période dont traite l’exposition, courte et nerveuse, que propose le Mémorial.

On y voit l’histoire d’une famille et de son destin sur une trentaine d’années ; on y découvre, au travers des portraits tirés par August Sander, une société toute entière, soigneusement documentée dont la classification n’est pas sans intérêt ; enfin, en quelques dizaines de photographies, Sander rend compte de la dimension militante et répressive de l’Allemagne gouvernée par les nationaux-socialistes.

La première série de portraits concerne donc le photographe et sa famille. L’homme est né en 1876 dans une famille de mineurs mais il apprend la photographie lors de son service militaire et après des séjours de formation en Prusse, en Saxe et en Autriche, il revient en Rhénanie s’installer à son compte, ouvrant une galerie de portraitiste professionnel à Cologne dès 1904. Les photos de la famille racontent une ascension sociale rapide, un mode de vie de classe moyenne à bourgeoise, une certaine aisance, peut-être un peu surjouée, la solennité des portraits affectant l’information qui en émane. La famille Sander compte quatre enfants, le couple est visiblement uni, famille représentative de l’incroyable accroissement démographique qu’a connu l’Allemagne wilhelminienne et qui s’investit dans les industries de la deuxième révolution industrielle, la photographie étant impensable sans les indus


Christian Ingrao

Historien, Directeur de recherche au CNRS