Les veilleuses et la cabane – à propos de l’exposition « Parties sans éteindre la lumière »
On nous avait dit : « Tu vas voir, c’est sombre ». Certes, la Fondation Ricard est plongée dans une sorte d’obscurité, mais considérant que ses deux salles (et demie) sont transformées en grotte, en sous-sol, en boyau, en coulisses de théâtre et plus généralement en « scène » fantasmatique, on ne peut pas dire que ce soit particulièrement sombre, ni au niveau des photons, ni au sens figuré. L’exposition de Pauline Curnier Jardin et Marie Losier, sous la houlette du commissaire Eric Mangion, s’intitule d’ailleurs « Parties, sans éteindre la lumière » et l’on est ici au cœur d’un dispositif de projection – à entendre aussi bien comme technologie cinématographique que comme espace psychique. Ce n’est donc sombre que parce qu’il y a des veilleuses allumées.
Si l’on pense d’abord à une grotte, c’est évidemment parce que, de Pauline Curnier Jardin, on connaît surtout Grotta profunda, approfundita (2011-2017), une des œuvres les plus remarquables de la Biennale de Venise 2017 : le visiteur s’y trouvait absorbé dans une espèce d’utérus rose ou rouge pour suivre les aventures filmées de Bernardette Soubirous, entraînée dans un cycle de métamorphoses pour le moins défrisantes. Même sentiment ici : on est happé par un parcours balisé de caissons lumineux haut perchés, de rideaux et de costumes de théâtre et de « boîtes à films » signées Marie Losier. Il faut pénétrer, s’enfoncer, se pencher sur des œilletons, la pulsion scopique joue à fond. Au bout du parcours, de dos par rapport à l’avancée du visiteur, s’expose Solo pour Geneviève (2018), présence disparaissante de la grand-mère de Pauline Curnier Jardin.
Les vidéos et les photographies qu’on voit sont cependant majoritairement signées Losier, dont l’univers cinématographique se joue un peu plus souvent en pleine lumière et à l’air libre que dans des caves, mais presque toujours sur des « scènes » ou dans des arènes : terrasses, plages, tréteaux, etc. Le lexique est celui du travestissement : perruques, bonnets d