Un vertige – à propos de Poétique de la critique littéraire de Florian Pennanech
Facétieux et un poil retors, diablement fidèle en tout cas à son maître Gérard Genette, Florian Pennanech semble avoir tout prévu des lectures critiques que l’on pourra faire de son travail, si bien que son copieux essai de poétique, sobrement titré Poétique de la critique littéraire nous met d’entrée dans une position particulière, à la fois amusante et inconfortable : nous voici en train de tenter la critique d’une poétique de la critique de la littérature, soit une espèce de manœuvre au quatrième degré, si tant est qu’un premier degré puisse en ce domaine seulement exister (évidemment non : la pure littérarité de la littérature est un leurre… mais il faut bien se ménager, parfois, le confort de quelques illusions).
Inutile en tout cas de se perdre ici en précautions, autant admettre d’entrée un vertige, et accepter que dans ces lignes se retrouvent – à leur corps défendant, si l’on peut dire – bien des traits dont Pennanech dresse l’inventaire, en bon typologue et maniaque poéticien-classificateur, dont l’objectif, si on veut accepter de le simplifier ainsi, ne saurait de toute façon que nous ravir : montrer que le critique est (aussi ? toujours ?) un écrivain.
Nous éviterons donc de nous demander ce qui relève dans notre propre texte de la prédication, référentiation, partition, aspectualisation, substitution, combinaison – soit les six opérations par lesquelles Pennanech conceptualise la littérarité de la critique littéraire – pour retenir d’abord la clarté de son projet : « ce que je propose dans cet ouvrage, annonce-t-il dans l’introduction, c’est de faire une typologie des opérations par lesquelles un texte en commente un autre, de montrer par quels procédés un commentaire critique s’écrit à partir d’un autre, ou plus exactement en invente un autre à partir duquel il affirme s’écrire. » Invention : c’est là en quelque sorte l’horizon jubilant de cet essai aux atours savants, du moins techniques, sinon franchement austères. Mais où l’on peut aussi