Cinéma

Il était plusieurs fois Tarantino – à propos de Once Upon a Time… in Hollywood

Professeur de littérature

Avec Once Upon a Time… in Hollywood, véritable manifeste cinématographique, Quentin Tarantino réaffirme ses positions d’auteur en multipliant les provocations à l’attention de la critique, et notamment à l’égard d’une certaine relation morale et politique à la fiction qui traverse les débats anglo-saxons depuis une trentaine d’années.

À chaque sortie d’un film de Tarantino ses polémiques. Celles-ci enflent de film en film, et se cristallisent en particulier autour de la manière dont s’articulent les questions politiques et esthétiques. On peut les expliquer par le double effet d’une politisation croissante du discours sur l’art (avec la montée en puissance des paradigmes analytiques des cultural studies) et d’une tendance des films de Quentin Tarantino à reprendre de manière polémique dans ses films les critiques qui lui sont faites.

Comme en témoignent les réactions extrêmement contrastées qu’il a suscitées, Once Upon a Time… in Hollywood n’échappe pas à une telle logique. Bien plus, tout semble indiquer que Quentin Tarantino a choisi de placer le débat avec la critique – et la réaffirmation de ses positions d’auteur – au cœur de cette nouvelle œuvre, non seulement parce qu’il choisit de la truffer de provocations (avec des scènes prêtant le flanc à des accusations de racisme, de sexisme, de masculinisme ou de « révisionnisme historique » pour reprendre une accusation qui avait été faite à Inglourious Basterds), mais aussi parce qu’il structure son film comme la mise en récit à travers l’histoire de ces conflits. Enfin, parce que, en quittant le pastiche de films de genre pour se centrer sur le monde du cinéma, il offre explicitement une vision du cinéma. En ce sens, c’est bien comme un manifeste qu’il faut voir Once Upon a Time… in Hollywood

Un cinéma de la sédimentation culturelle

Avant d’aborder son dernier film, on peut dire un mot de l’esthétique de Tarantino. Pourquoi son cinéma prête-t-il plus que d’autres le flanc à une polarisation des propos, entre politique et esthétique ? Parce qu’il propose un cinéma qui s’inscrit toujours dans une histoire (celle du cinéma et, de plus en plus, celle qui sert de soubassement à notre modernité), et qui choisit d’aborder cette histoire à travers la trace qu’elle a laissée dans notre imaginaire – autrement dit, parce qu’il explore non seulement les es


[1] Nous prenons le mot sériel au sens large : non seulement celui des séries à personnages récurrents, mais des productions sollicitant explicitement les conventions d’une série dans laquelle elles s’inscrivent : films de genre, œuvres liées à des réseaux de production contraignants, etc.

Matthieu Letourneux

Professeur de littérature, Université Paris Nanterre

Rayonnages

Cinéma Culture

Notes

[1] Nous prenons le mot sériel au sens large : non seulement celui des séries à personnages récurrents, mais des productions sollicitant explicitement les conventions d’une série dans laquelle elles s’inscrivent : films de genre, œuvres liées à des réseaux de production contraignants, etc.