Opéra

Le tout des relations – sur Le Premier meurtre, un opéra d’Arthur Lavandier

Critique

En l’absence de festivals et de créations lyriques, on peut toujours voir et revoir des œuvres en ligne. Parmi les ensembles les plus actifs en ce moment critique, le Balcon propose Le Premier meurtre, un opéra d’Arthur Lavandier, qui offrait en 2016 une esthétique politique pour notre ère de l’information : perception et interprétation contre diktat de la communication.

Il y a un formidable opéra qui date de 2016 et qui s’appelle Le Premier meurtre. Il est d’Arthur Lavandier et il est en ligne sur YouTube depuis le 1er mai. Allez le voir.

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Voilà, on pourrait s’arrêter là, car jusqu’ici, on n’a guère écrit de critique dans AOC qui ne dise à quoi pourrait servir politiquement et socialement l’objet dont on parle. Or l’opéra, outre qu’il est porté disparu depuis longtemps (un peu comme la poésie, la peinture et le poivre de Sichuan sur les cartes des restaurants), n’évoque pas exactement dans l’esprit du public le politique, si ce n’est par son association aux costumes d’époque et au carton-pâte, au culte des prima donna statiques et donc à quelque chose de plutôt poussiéreux, jonché d’héroïnes en -a et de compositeurs en -i.

C’est évidemment une erreur de perspective : l’opéra ne se limite pas à une poignée de tubes compassés, même si, pris à la gorge financière, les grandes maisons lyriques ne donnent pas toujours l’impression qu’il existe quelque chose au delà du Barbier et de Tosca ou, pour les plus aventureux, après le Capriccio de Richard Strauss, qui est supposé rembobiner le genre en 1942. Or il se trouve que, passant sur Facebook durant le confinement, on voit annoncée sur la page de l’ensemble Le Balcon la mise en ligne de ce Premier meurtre, dirigé par Maxime Pascal, dont les résurrections du Donnerstag et du Samstag aus Licht de Stockhausen nous avaient soufflé.

Le premier meurtre est une collaboration étroite entre trentenaires : le compositeur Arthur Lavandier, le librettiste Federico Flamminio et le metteur en scène Ted Huffman, un jeu de ping-pong et d’ajustements entre France, Italie et USA. Il y a aussi le directeur artistique et musical du Balcon, Maxime Pascal, qui confirme : « Notre modèle s’est naturellement formé plutôt sur la base du collectif, du travail horizontal. » L’œuvre a été largement saluée à sa création à l’Opéra de Lille et j’avoue pour ma part ne pas me lasser de la revisionner. Un mystère


Éric Loret

Critique, Journaliste