Signaux d’alerte – sur Wuhan ville close de Fang Fang et Un hiver à Wuhan d’Alexandre Labruffe
Que s’est-il passé à Wuhan au début de cette année 2020 ? Les historiens documenteront comment un cluster de pneumonie atypique fut détecté à proximité d’un marché aux animaux, comment les patients ont afflué en situation de détresse respiratoire dans l’hôpital central situé à proximité de ce marché, comment un virus analogue à celui qui a causé en 2003 la crise du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et d’autres virus circulant chez les chauve-souris a été identifié chez ces patients dans un laboratoire de haute sécurité, comment les autorités locales ont d’abord nié la transmission interhumaine de la maladie avant de fermer la ville de 14 millions d’habitants, dont 5 millions étaient déjà partis à l’occasion des fêtes du Nouvel An chinois.
En attendant ces enquêtes documentées, les écrivains peuvent témoigner de la façon dont ces événements ont été vécus : nervosité et sidération, angoisse et colère, mais aussi humour, bon sens, solidarité, réflexivité. Ils donnent forme aux émotions qu’ont ressenties les habitants de Wuhan, à travers deux mois de confinement, qui ont servi de terrain d’expérimentation pour des mesures sanitaires inédites appliquées ensuite au monde entier, au fur et à mesure de la progression de la pandémie de Covid-19.
Les livres de Fang Fang et Alexandre Labruffe montrent chacun ce que peut la littérature à l’heure des réseaux sociaux, où l’information est à la fois proliférante, standardisée et contrôlée. Tous deux sont des écrivains reconnus : Fang Fang, qui a publié plus de quatre-vingt romans, a été présidente de l’association des écrivains du Hubei pendant dix ans ; Alexandre Labruffe a publié en 2019 un premier roman remarqué, Chroniques d’une station-service, et travaille comme attaché culturel au consulat de France à Wuhan. Ils choisissent des formes brèves et fragmentaires pour témoigner du choc qui secoue la capitale du Hubei.
Fang Fang écrit chaque jour un texte sur son compte Weibo, dans lequel elle insère les propos