Littérature

Sollers, tel qu’en lui-même – sur Légende et Agent secret

critique

Si Légende apparaît comme une suite d’annotations, de réflexions ou de commentaires sur l’époque, un carnet de croquis criblé de citations et de références aux fées que s’est choisies l’écrivain, Agent secret répond à une commande autobiographique. Dans ses deux ouvrages, Philippe Sollers se montre moqueur, leste mais moins féroce qu’il n’y paraît. Aveuglé, il préfère rester. Tel Quel.

Page 25 de Légende, dans une section intitulée « Rencontres », Philippe Sollers évoque un prénom féminin qu’il chérit : Laure. L’or n’est pas un personnage. Ni la Laure de Pétrarque. Laure était la tante de l’écrivain, qui conseille de se reporter aux pages 38-39 de l’édition Folio de Femmes, où apparaît un autre prénom. Intriguée, nous l’avons suivi et nous sommes tombée sur une scène érotique lumineuse : naissance du désir, « grande clarté assourdissante de juillet », lecture, jeu, parfum d’interdit, pudique impudeur. Un comble de génie français, mélange de séduction et d’ennui, de langueur et d’excitation.

C’était en 1983, date de parution de Femmes. Le livre fit grand bruit. La même année, Sollers quittait Le Seuil pour aller dans le camp d’en face, Gallimard, chez qui il fonda une collection baptisée « L’Infini ».

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Quarante ans plus tard, en 2021, l’écrivain poursuit sa quête de l’infini. Entendez par là quelque chose comme une manière de vivre, d’Être, et de lire le monde (et, peut-être, une substance nommée Dieu ou, plutôt, dieux et déesses), le refus tenace de la technique et de la foule, un goût de la liberté extrême, un amour du hasard et de la nature, celle-ci étant pieds et poings liés à la culture représentée par un Nicolas Poussin.

Le tableau de Poussin cité dans Légende est Apollon amoureux de Daphné. Beauté, mystère. Daphné est en effet le fil d’Ariane de ce récit intitulé Légende. Le livre n’a rien d’un roman, il se lit comme une série d’exercices mentaux. L’écrivain fait ses gammes.

Comme Désir, paru il y a deux ans, c’est une suite d’annotations, de réflexions ou de commentaires sur l’époque, un carnet de croquis criblé de citations et de références aux fées que s’est choisies Sollers : lointains et sages auteurs venus d’une Chine d’antan, Mozart, Manet, Rimbaud et Mallarmé, Céline et Genet, mais aussi Hugo et Artaud ; de rares figures héroïques du XXe siècle, De Gaulle et Roosevelt, des souvenirs…

Sollers sautille mais persévère. Il tois


 

Cécile Dutheil de la Rochère

critique, éditrice et traductrice

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