Au-delà de l’uniforme – sur Gardien Party de Mohamed El Khatib et Valérie Mréjen
Jusqu’au 26 septembre 2021 se jouait, dans une des galeries du Musée national d’art moderne à Paris[1], Gardien Party, spectacle conçu et réalisé par Mohamed El Khatib et Valérie Mréjen. Comme son nom le suggère, le spectacle met en scène de vrais gardiens de musées, avec un dispositif assez économe : six gardiennes et gardiens se tiennent dans un espace délimité au sol par les marques qui indiquent habituellement la ligne à ne pas dépasser pour regarder les œuvres. Face au public, chacun avec leur chaise – attribut par excellence de leur fonction[2] –, ils racontent, dans leur langue (français, américain, russe, suédois, coréen), comment ils sont arrivés là et comment ils occupent leurs journées, partagent des anecdotes sur les visiteurs ou les comportements de leurs collègues.

À travers ces petits récits de vie, Gardien Party met au centre de l’attention la figure du gardien et fait état, par-delà les variations culturelles, nationales et institutionnelles, d’une condition commune : être visible mais ignoré. Les gardiens sont plus intéressants qu’ils n’en ont l’air, ils ont des choses à nous dire et méritent d’être entendus et regardés : voilà ce que semble nous dire, en substance, Gardien Party.
Mais à qui le spectacle pense-t-il devoir adresser ce message, qui cherche-t-il à convaincre, avec quelles finalités ? Et quelle en est la portée ? C’est dans la relation qu’il institue entre son message, les moyens de son expression et la position dans laquelle il place son public que, bien qu’a priori sympathique, Gardien Party m’a paru problématique – voire symptomatique –, à différents égards.
Par son propos et sa démarche, le spectacle participe en effet de différentes tendances qui caractérisent un ensemble de productions aujourd’hui, en littérature, en art et en sciences sociales, qui se donnent pour mission principale de décrire des expériences, de raconter des vies, comme une façon privilégiée de prendre en considération celles et ceux auxquel·les on do